Sheriff d'or 2014 :vote final

J'ai rendu Ulysse à Manue, merci ; effectivement, très bel ouvrage, un petit peu professoral quand même, mais que je garde avec grand plaisir.
Le 17 nous aurons tous nos injustices et nos rancœurs : gageons que le débat reste cordial et constructif, concentré sur les livres et non dévié sur les membres du jury.

Pour ma part, c'est "Orientalisme" qui ne passe pas : non seulement le dessin me fait fuir, le scénario ne m'a pas capté, mais en plus il a sorti le jubilatoire "Une affaire de caractère" lors d'un vote que j'ai trouvé confus.
"Vacuum" n'est pas un tés bon ouvrage.

"Cœur glacé" non plus ne m'a pas laissé un souvenir impérissable.
Et enfin la lourdeur de la thérapie "Carnation" n'a aucun gout de reviens-y (en bougnat dans le texte).

Ce n'est pas un hasard si les 6 autres sont sur mes étagères.

Je ne vois pas de nécessité à élire un chef d'œuvre. Je préfère faire confiance à l'instinct émotionnel qu'à l'analyse d'arguments. Je ne dis pas avoir raison, mais j'aurais du mal à changer. Et c'est pour cette raison que j'ai voté pour "Panthère".

Si un des finaliste refuse le titre, c'est bien dommage, mais est-ce recevable ? Doit-on alors demander en amont à chaque auteur s'il accepte d'être sélectionné ? Je crois qu'un restaurateur ne peut refuser les étoiles Michelin...à moins de fermer.

A voir pour 2015.

Aucune nécessité d'élire un chef d'oeuvre. Il serait d'ailleurs assez amusant de choisir une belle bouse à la place

Cependant, il est important de choisir un livre qui soit partagé. Le terme 'élire' est problématique, dans le sens où si l'on vient pour voter, que notre avis est fait, qu'on a fait notre liste et que "c'est pas grave, je l'avais classé en 3e, alors c'est bien", on a une drôle de conception de l'acceptation de la parole de l'autre.

L'idée, je le pense, c'est de se mettre d'accord. Je préfère quand je mets l'autre d'accord avec moi, mais si je veux être en posture de le faire, il faut en contrepartie, sinon ça ne marche pas, que j'accepte qu'il puisse me mettre d'accord avec lui.
On ne pourra pas se mettre tous d'accord, mais il faut essayer d'arriver, non pas au plus grand consensus (j'y reviens), mais au plus grand accord possible. Pour cela, il faut qu'on en parle, sinon cette réunion ne sert qu'à boire un coup de plus.

Le consensus, pour moi, c'est plutôt quand on constate qu'on est d'accord a priori, au moins sur un point, et qu'on sait déjà que ce point est essentiel. Je me méfie, je l'ai déjà écrit un peu plus haut, du consensus. Je préfère qu'on me plie à choisir un truc qui ne m'avait pas paru digne de ça, mais qui emporte l'adhésion à force d'arguments et de persuasion.

On est pas là pour élire, à la majorité, on n'en a pas la légitimité. Quelle majorité serions-nous ? Un jury est là pour choisir. Le vote, c'est notre outil, il est contestable, comme tout autre.

J'espère que nous sommes prêts, non pas à nous écouter, mais à vouloir nous comprendre, et nous contredire. C'est pas plus ça, la liberté d'expression ?

Ton approche , Eraserhead, est subtile, éclairante .Pour moi, écouter veux forcément dire chercher à comprendre l'autre,mais ce n 'est peut-être pas le cas de tout le monde ; et l' on peux aussi malheureusement s'exprimer haut et fort "en toute liberté" sans écouter l'autre, certes c' une liberté pour celui qui s'exprime, mais ce peut être une aliénation pour celui qui n'est pas écouté. Dialoguer, discuter , voila ce qui nous attend, l'étymologie de ce dernier verbe est intéressante : du latin discutere "faire tomber en cassant", puis "écarter ; fouiller", (en latin chrét. trad. du grec : "inspecter"), de quatere "secouer" → casser .

Mémère, je laisserai Ulysse à la librairie dès mardi .

Eraserhead, je ne désespère pas de me faire comprendre de toi, rien qu'une fois, du 1er coup.
Je vote pour un livre qui me touche et non pas pour une explication de texte le jour de la réunion expliquant par a + b que c'est ce livre le meilleur.
"Les tontons flingueurs" ont leur place dans ces chefs d'oeuvres, comme Godard ; le génie évident et accessible du premier n'est pas moins ou plus que l'autre : il est différent. Pourtant je ne suis pas certain que tous les fan de Godard soient les mêmes que ceux d'Audiard !!!
S'il faut forcément élire un livre complexe, qui nécessite la culture générale d'un énarque et les capacités d'abstraction d'un normalien pour le comprendre, dis le maintenant, car je ne vais plus me sentir à ma place à tes côtés.
NB : je retiens l'excellente idée d'élire une bouse, mais une énôôôôôôrrrme hein, juste une fois par an.

Non, mais je comprends, faut pas croire !!

Effectivement, on peut opposer Les tontons flingueurs et godard. C'est une bonne idée.
Si on prend ces exemples, on pourra critiquer les uns pour leur grande qualité d'écriture mais aussi pour leur 'académisme' dans la réalisation, en tout cas le manque d'originalité, le peu d'inventivité formelle.
L'autre (selon de quel film on parle, mais je crois comprendre ce que tu veux dire), pour sa froideur et son peu d'envie de parler au public, mais aussi pour ses grandes qualités plastiques et une réflexion de fond concernant le langage cinématographique.

Je ne crois pas qu'il faille la culture d'un énarque et de grandes qualités d'abstraction pour être touché par la grande culture d'un livre ou par son abstraction. En revanche, pour l'analyser, pour en parler, sans doute en faut-il un peu. Je suis plus touché par la froideur de certains godard (Je vous salue Marie, Une femme mariée) que par la franche gaudriole, c'est sûr.
ça ne m'empêche pas d'apprécier La Cité de La Peur, Dodgeball ou Les Monty Python, et de ne pas trouver Etaix drôle, ni fin. Les goûts et les couleurs...

Je ne vois pas l’intérêt de reprendre le débat stérile sur les chef d’œuvres. Par contre, on a jamais débattu sur ce qu'est une belle bouse.

Je n'ai pas beaucoup parlé lors de notre dernière rencontre, je n'étais pas en état de réagir suffisamment rapidement.

Bien que les avis exprimés par les uns et les autres étaient intéressants, voir éclairants, j'ai trouvé les discussions particulièrement violentes et agressives. Je ne vois pas comment on peut se comprendre et se contredire sans s'écouter. Or, nous ne savons pas nous écouter et c'est toujours celui qui gueule le plus fort, et qui sait le mieux parler, qui se fait entendre.
Dans ces conditions, il est bien évident qu'il n'est pas question de chercher un consensus (même si ma définition n'est pas tout à fait la même que celle d'Eraserhead). Quand on cherche à imposer son point de vue sans laisser l'autre s'exprimer dans le calme et jusqu'au bout, c'est la loi du plus fort.

Je le dis très fermement et sans aucune menace mais juste parce que, pour moi, c'est insupportable, si le débat se déroule de la même façon samedi prochain, je partirais. Tout simplement parce que je ne me sentirais pas à ma place.

et je préfère une oeuvre qui me perturbe, me résiste, qu'une oeuvre confortable.
Ne vaut-il pas mieux un livre sur lequel on sera amené à revenir, parce que notre lecture (à cause de nos manques sans doute, de notre inattention...) en est forcément incomplète, peu assurée, un livre qui nous échappe, qu'un livre dont nous avons fait le tour immédiatement, tous le même, aussi beau le tour soit-il ?

Mais "Les Tontons", je ne fais qu'y revenir, encore et encore !!!
A partir du moment ou on doit t'expliquer que c'est bien parce que ceci cela, pour moi, c'est raté. Je suis ému, et je suis tout ouïe pour apprendre les références qui m'ont échappé de l'ouvrage le plus complexe, mais je suis ému d'abord ; je reste sur place, et ce ne sera pas une dissertation qui me fera changer d'avis.

Le top, c'est l'émotion et la réflexion, ce que j'ai trouvé en Ulysse .

Et puis, je ne pense pas qu' on puisse parler de bouse quand aux oeuvres de notre sélection finale, mais c'est de l'humour n'est ce pas ? Ce serait assez irrespectueux envers les auteurs qui se donnent bien du mal pour créer et parfois satisfaire nos terribles exigences de lecteurs. Je n'ai vraiment pas aimé Vacuum mais jamais je ne le considérerai comme une bouse.
Respect aux auteurs, aux artistes, même lorsque que c'est raté, imparfait, car eux, ils ont le mérite de tenter quelquechose, ils s'aventurent et prennent des risques, c'est leur métier, c'est leur vie ... Et nous, nous lisons confortablement assis dans notre fauteuil...

Charles Olivier a écrit:

Mais "Les Tontons", je ne fais qu'y revenir, encore et encore !!!
A partir du moment ou on doit t'expliquer que c'est bien parce que ceci cela, pour moi, c'est raté. Je suis ému, et je suis tout ouïe pour apprendre les références qui m'ont échappé de l'ouvrage le plus complexe, mais je suis ému d'abord ; je reste sur place, et ce ne sera pas une dissertation qui me fera changer d'avis.

ça c'est bien dit, d'ailleurs dans nos réunions cette année, ce sont presque les livres dont nous avons le moins parlés qui ont été élus (ok je n'étais pas là mardi dernier), comme une évidence, n'est ce pas ?

donc, ça sert à rien ?
restons-en sur l'émotion, et rassurons-nous en voyant que nous sommes parfois nombreux à ressentir la même.

Bah non t’exagères toujours, ce sont bien souvent la combinaison des deux, la bouse ne donne pas d'émotions, Gipi m'en donne, par la qualité de ses planches, par la sensibilité de son écriture, on peut se le redire, il n'y a pas de souci.

1- J'aime bien qu'on m'explique pourquoi c'est bien...
ou pourquoi c'est pas si bien que je le croyais...
C'est pourquoi je lis avec plaisir les critiques... Et je crois aussi qu'on a parfois besoin d'être accompagné pour comprendre certaines oeuvres. Cela ne les rend pas plus mauvaises. Cela nous rend certainement meilleurs !

2- Je trouve que les échanges autour de Sens et de Panthère ont plutôt été de bonne qualité même s'ils ont été fougueux. On a tout de même entendu (entendu plutôt qu'écouté, c'est vrai !) de vrais arguments, me semble-t-il.

3- L'émotion si elle est nécessaire (et incontrolée !) implique ensuite une prise de distance.
Les événements que nous vivons aujourd'hui nous permettent de réfléchir encore sur l'idée de justice, par exemple, qui ne peut être gouvernée par les émotions. J'enrage ainsi contre ceux qui sont heureux ou soulagés de voir les terroristes tomber sous les balles...

4- On peut ne pas trouver "beaux" les dessins de Presl. Mais cela fait longtemps que l'art s'est éloigné de la question du beau.
Et je pense qu'il faut aussi entendre - ou tenter d'entendre -  eraserhead qui défend l'art de la narration de Presl, la composition des planches de fort belle manière.

5- La "bouse" peut donner des émotions.
Je vous invite à lire "vache de vache" de Mathis et Jambois aux éditions Paquet
Par ailleurs, je vous rappelle qu'eraserhead n'a pas manqué d'être ému à l'écute des chansons de Chantal Kelly (allez donc faire un tour sur le sujet dédié) et que j'ai versé ma larme aux malheurs de la famille Ingals... (et les "tontons" ne me touchent pas du tout, du tout...)

Superphane a écrit:

je vous rappelle qu'eraserhead n'a pas manqué d'être ému à l'écute des chansons de Chantal Kelly (allez donc faire un tour sur le sujet dédié)

c'est malin !!

Je ne pensais à aucun ouvrage. Je me remémorais une interview de Philippe Noiret évoquant les mauvais films de sa carrière, c'est tout.
Pour "Rouge Karma" je m'étais entêté à le défendre car j'étais dérangé par le ton.

Avec Gipi, on a tès bien commencé l'année.

Je pense que plusieurs éléments sont essentiels pour s'écouter, échanger et pouvoir faire un choix commun.
D'une part le nombre de participants.
A deux ou trois, cela est en effet beaucoup plus aisé de partager, d'échanger et de se laisser convaincre.
Dès que le débat engage un nombre important de protagonistes, cela devient extrêmement périlleux.

D'autre part, il faut la possibilité de se laisser convaincre. Autrement dit, entre Panthère et Sens par exemple j'aurais volontiers écouté les uns et les autres, me laissant surprendre par une argumentation, revenant sur mes sentiments ou analyses. Mais cela n'aurait été faisable seulement parce que mon choix était encore incertain et que les deux BD avaient pour moi des qualités équivalentes. Par contre si cela concerne une BD que je n'ai absolument pas aimée et une autre que j'ai adorée, je pense qu'il me sera vraiment difficile de changer d'avis.

Raphaël Enthoven lors d'une émission de "Ce soir ou jamais" avait très bien expliqué ce que devrait-être un débat, soit l'art d'écouter et surtout la possibilité de se laisser convaincre. Il est alors exclu de vouloir imposer ses idées, mais bien de venir l'esprit ouvert, sans peur de se laisser porter par l'argumentation (raisonnée) de l'autre et sans apporter de façon péremptoire ses propres convictions (et réciproquement bien entendu!).

Et voilà, avec mes enfants pas loin, mon texte c'est dématérialisé dans le néant de l'informatique. J'adore réécrire....


Comme beaucoup ne comprennent pas mes dernières phrases, je me demande si je ne suis pas chef d’œuvre. lol

Attention pour samedi prochain, si certains membres du jury s'emballent. Ils devront répondre d'un câlin avec ma personne pour rassembler leurs émotions.


Je crois qu'une oeuvre doit être facile à comprendre en première lecture.
Je m'explique. La lecture d'une BD prend environ de 20 à 30 minutes. Si je dois avoir une tablette avec accès à internet pour capter toute les références et les détails. C'est 3 h ou 4 h pour une BD. Au revoir l'émotion dans ce cas là.
Ensuite à la relecture, les détails qui lient notre impression globale apparaissent. Et là, on prends du plaisir à relire. Surtout si les érudits nous ont mis le nez sur de nouvelles interprétations.
Je précise que le clan des émotifs et des érudits peuvent trouver un terrain d'entente.

Pour moi une œuvre incompréhensible à la première lecture est difficile à conseiller. Et je rappelle que c'est un peu l'objectif de partager nos lectures.

Au fait, qui a compris l’Intérêt d'avoir les deux Lantz (20 et 45 ans) dans le même espace temps?

@gaga : oui, mais justement quand il y a un livre que tu n'as pas du tout aimé, tu peux te laisser convaincre, difficilement, mais tu peux aussi (surtout?) essayer de convaincre que ça n'est pas le livre qu'il nous faut

Entièrement d'accord Eraserhead, et cela est bien évidemment un défi plus intéressant que de convaincre (ou de se laisser convaincre) par des arguments déjà partiellement (ou complètement) acceptés (le consensus mou?)

Mais malheureusement, dans la pratique, cela ne fonctionne guère. Si?
Bien sur, qui ne tente rien n'a rien, mais il faut alors que tout le monde joue le jeu.

Et Igor, je suis plutôt d'accord avec toi et ton analyse. Et en plus j'ai tout compris cette fois!

Je crois qu'une oeuvre doit être facile à comprendre en première lecture

On n'est pas sorti de l'auberge avec des sottises pareilles !!!
On ne peut réagir de la même manière à la lecture de Pascal, Sade ou Modiano, non de non !
La lecture - surtout dans le cadre d'un prix - peut s'entendre aussi en terme d'efforts à faire.
Le plaisir est multiple et se laisser aller à des oeuvres un peu résistantes est un plaisir intellectuel parfois vif...
Je crois même que les livres qui résistent sont souvent les meilleurs.
On n'élit pas le meilleur livre de plage, me semble-t-il...

Superphane je me suis fais mal comprendre! Pas facile de dire des sottises lol
Bien sûr qu'il faut faire des efforts. Cela permet d'apprécier en profondeur une œuvre. Mais il faut une porte d'entrée qui donne envie de creuser.

Après exposé le positif et négatif est instructif. Et j'ai bien failli changer d'avis entre Panthère et le sens lors de notre dernière confrontation (oups réunion).

J'ai relu White Cub. Je comprends mieux l'argument sur l'égalité de l'oeuvre. Par contre, j'ai souri souvent face aux facéties des jumeaux.

Coeur glacé: les idées développées m’intéressent mais le traitement me barbe. La lecture est difficile avec ses changements de taille de police.

Lune l'envers: Le dessin me submerge. Les traits du visage expriment les émotions, la jeunesse, le caractère, ... Le passage entre les scènes est parfois brutal. Et puis je n'ai pas tout compris.

Carnation: encore sous le plastique, je n'ai pas envie de l'ouvrir.

J’hésite entre Lune l'envers, Panthère et Le sens...

Igor, tu " hésites entre Lune l'envers, Panthère et Le sens... "


Cool, je vote pour Sens alors

C'est sûr Igor tu es un chef d'oeuvre