Vote d'avril 2015

fred a écrit:

 J'essaye aussi d'exprimer des retours de membres du jury qui sont d'accord avec moi mais n'osent pas s'exprimer

d'habitude tu les encourages à s'exprimer. Ce serait vraiment bien que tout le monde s'exprime dans ce débat, dont on a pointé les enjeux.

fred a écrit:

il n'a pas fait d'adaptation.

Je vais t'envoyer un de mes élèves de 3e, qui vient de me faire un exposé assez efficace, et étonnant, sur la notion d'adaptation...

adapter, on est bien d'accord, c'est reprendre à son compte une oeuvre, et par une version qu'on en livre, livrer en même temps un discours sur l'oeuvre antérieure (là, c'est le cas des meilleures), et par effet de ricochet, un discours sur sa propre oeuvre (encore mieux).

Oui, il a imaginé des SÉQUENCES d'après un texte existant.
C'est déjà fort bien, en plus il dessine remarquablement.
Cyrano de Bergerac avec Depardieu est aussi une excellente "adaptation" et je serai ravi que ton élève de troisième puisse m'aider (ou m'enfoncer).
J'encourage les membres, bien évidemment, mais reconnais que tu fasses peur et qu'ils se méfient.
En ce qui concerne ton dernier post, je pense qu'Auladell se situe dans la première catégorie de ton énumération.

Ne t'inquiète pas, Fred, je ne suis pas irritée !
Je suis loin, et je ne croise personne du jury avec qui discuter de tout ça - et j'ai parfois l'impression que ton avis, en tant que membre du comité et en tant que libraire, compte beaucoup (et je pense sincèrement que c'est le cas, et que c'est justifié au vu de ton expérience et de ta culture) et influence le jugement de tes lecteurs (et c'est bien ce que l'on peut attendre d'un bon libraire !). D'où mon envie, parfois, de rééquilibrer la balance ...

J'entends le fait que tu te fasses aussi le porte-parole de certains membres plus timides - et je suis embêtée que ceux-ci ne participent pas plus à nos débats. Je pense être quelqu'un d'assez discret, voire timide aussi, et très souvent, je ne me sens pas assez armée en culture BD pour pouvoir argumenter (surtout après avoir lu des critiques écrites par certains, dont toi, et dont le niveau d'analyse est toujours ... ). Mais, en devenant jury, je me suis engagée à analyser mes ressentis pour pouvoir les exprimer à l'écrit et en débattre ici. Et les commentaires des lecteurs plus aguerris m'aident à mieux réfléchir et verbaliser mes pensées.
Je me suis parfois dit que je n'avais pas les connaissances suffisantes pour intervenir, ou que mes remarques étaient peut-être à côté de la plaque - et j'ai craint de me faire rembarder. Mais je constate que les membres du comité, si prompts à s'"étriper" entre eux (et parfois, ça fait peur ... ) sont plus indulgents à l'égard des débutants comme moi...
Tout ça pour dire que moi, je voudrais bien qu'on soit plus nombreux à s'enflammer sur ce forum (parce qu'en plus, c'est quand même assez plaisant de se titiller comme ça !)

oui, c'est plaisant, ça faisait un moment qu'on n'avait pas échangé comme ça !
après, j'en ai bien pris plein la tête, quand même, de nullissime à de mauvaise foi, en passant par le fait que je fais peur à tout le monde...
Fred, tu as dit que tu voulais susciter la parole, nous faire réagir, et après tu me demandes de reconnaître que je bloque la participation...

C'est la finale avant l'heure...
Je suis passé à côté de cet échange rugueux et courtois.
Je ne vois que peu (ou pas, d'ailleurs) de défauts aux deux livres... Alors comment me décider pour ce vote ?

Tu es débutant dans l'aventure, tu ne sais trop comment t'y prendre, tu as plusieurs possibilités :

1- Tu fais comme le chef y dit !
Tu as un peu peur du chef qui sait, avec son regard perçant et ses saillies drolatiques remettre le client à la bonne place ou se moquer du juré indécis. Mieux vaut être dans ses favoris ! Tu choisis Mathias Lehmann.

2- Tu fais la nique à Eraserhead.
Parce que bon, des fois, il y va pas de main morte avec les nouveaux, et il dégaine tellement rapidement qu'il oublie une fois sur deux les majuscules en début de ligne. Tu votes Mathias Lehman, bien fait pour lui.

3- Tu fais ça sérieusement.
Tu es quelque peu ignare et connais mal Milton et Simenon. Tu fais donc des efforts et tu lis fièvreusement les posts argumentés de ceux qui savent. Tu laisses de côté les arguments inutiles (là une case en trop, là une faute d'orthographe) et tu te fais ton idée (en essayant d'éviter de penser aux méthodes évoquées en 1 et 2 !)
Tu te dis qu'on tient deux très beaux livres et que le choix est forcément compliqué.
Après avoir réfléchi, tu votes Auladell, parce que c'est le mieux des deux.

4- Tu choisis au hasard, parce que parfois, il fait bien les choses.
Très probablement, tu votes donc Auladell.

5- Tu votes comme tu vis (ce n'est pas du tout la bonne méthode mais parfois ça arrive).
Tu as eu un coup de coeur au collège quand ton prof t'a fait lire Vipère au poing. Tu votes Mathias Lehmann.
Tu as d'excellents souvenirs de catéchisme. Tu votes Auladell.

Comme je déteste Vipère au poing, que je n'ai pas peur du chef, et que je tiens aussi à encourager Feufollet dans cette défense sans faille du sublime livre d'Auladell, je vais aller voter pour lui...
Cependant, je peine énormément à lire Chateaubriand (ce que ça peut me barber, c'est incroyable), je n'ai pas de souvenirs doux et frais du catéchisme (je n'y ai même jamais mis les pieds) et j'aime tendrement notre chef... Mais que vais-je faire ???

je tiens à dire que je n'ai pas franchement de souvenirs très émouvants du catéchisme, pas plus que de mes entrainements de foot, en revanche, Vipère au poing, ça a été une purge absolue.
On n'est pas obligé d'aller à la messe si on lit quelques lignes de la genèse.

J'ai voté "La favorite" qui à mon sens réunit un ensemble incroyable de techniques graphiques ou narratives qui se mettent réellement au service de la création pour composer au final une œuvre totale, une grande bande dessinée.

Le Paradis perdu reste un ovni dans son genre, sa grandeur, sa froideur et son côté démonstratif font à la fois sa force mais sans doute quelques unes de ses faiblesses, le livre manquant de fragilité à mes yeux.

Wonderland, ah pauvre Tom Tirabosco et son récit intimiste, il n'est pas tombé au bon endroit, ni au bon moment, éclipsé par les deux autres titres, un modèle de bande dessinée et un livre hors norme. Alors, certes il est effectivement en deçà et pâtit d'une dernière partie un peu poussive, je suis pourtant convaincu qu'on tient là une des plus belles autobiographie réalisé ces derniers temps. ce titre m'a procuré de belles émotions, merci pour ce bout de vie.

Enfin, pas de chance non plus pour Édith et sa belle adaptation du Jardin de minuit, là aussi, il y avait trop de concurrence, une adaptation mais aussi une œuvre originale plus réussie, je suis néanmoins ravi d'avoir découvert cette histoire que je ne connaissais point et je trouve qu'elle s'est parfaitement appropriée le best seller, en l'amenant dans son propre univers.

Bin, on n'est pas dans la mouise... avec ces deux poids lourds aux antipodes l'un de l'autre, qui ont le mérite, outre leurs excellences respectives, d'enflammer nos débats !

J'entends les arguments de chacun, qui bien souvent font mouche ; mon cœur va sans hésitation au Paradis perdu, mais la croisade de Fred pour la sheriffabilité de la Favorite est tout aussi respectable que justifiée.

Mon problème ce mois-ci, outre le manque de temps ( le potager est chronophage ! ), est que les deux prétendants ont tout autant de cohérence l'un que l'autre. La cohérence ( ou l'homogénéité, ou la vraisemblance ) est un paramètre dont je me sers parfois lorsque le choix est difficile. Mais là, pas moyen, les deux univers sont aussi affirmés et enveloppants l'un que l'autre.

Je vais donc attendre de lire les avis de ceux qui ne se sont pas encore exprimés pour envoyer mon vote qui sera, croyez-le, tout sauf stratégique !

Un mois avec de très intéressantes lectures dont trois basées sur l’enfance.
Deux bandes dessinées ressortent du lot avec une très bonne argumentation pour chacune.

Je vote pour Le Paradis Perdu de Pablo Auladell pour la beauté du livre et pour la réussite de l’auteur à m’avoir fait voyager au-delà de la simple narration. Pour un sujet qui m’est quasiment inconnu (merci à Feufollet de nous avoir guidée), Auladell nous offre une œuvre romanesque parsemée de multiples références picturales et donne à ses personnages une humanité encore peu vue dans les précédent Sheriff de l’année 2015.

Mais c'est trop cool! Et un câlin pour Eraserhead, en fait ton héros c'est Caliméro!
Je suis au lycée et je n'ai pas accès aux commentaires sur le Paradis perdu.


Adaptation ! Adaptation ! Est-ce que j'ai une gueule d'adaptation ? Bon, c'est grave d'adapter? Il y a une douceur dans cette œuvre qui contraste avec le sujet. Même le moment où Adam doit partir du Paradis est doux. Et pourtant, il se fait virer.

Je vais attendre pour mon vote, mais le traitement d'une douceur absolue de cette adaptation (ou pas), me plait beaucoup! Le dessin en lui même est doux. Mais aussi la mise en page avec de grosses vignettes qui s'accompagne d'une narration métaphorique (on a le temps de se promener dans le dessin tout en philosophant sur le propos). Et puis les dialogues, plus concrets, s'accompagnent d'un découpage en symbiose avec la narration.

Igor est un garçon doux

Toi aussi Superhane tu veux ton câlin?

Je vais me libérer pour la prochaine réunion. Et mes bras seront plein douceur....

Après réflexion, je ne regrette pas que ces deux titres soient parus le même mois mais plutôt la même année ! La Favorite et Le Paradis Perdu sont deux livres tout à fait exceptionnels et je vais bien entendu voter pour mon favori qui est quand même le Paradis perdu. Je tiens cependant à rajouter, enthousiasmé que je suis par ces deux titres et aucunement par dépit, que je me fiche totalement du gagnant de ce mois tant il est certain qu'il deviendra mon poulain pour le Sheriff d'Or final sauf si les mois suivants sont au niveau de celui-ci, ce que je ne peux qu'espérer bien entendu.
Nous avons en face de nous deux conceptions totalement différentes de la bande dessinée : dans le séquençage, dans le texte et son utilisation, le dessin. Dans la Favorite, Lehmann construit ses planches d'une manière on ne peut plus graphique, le texte devient décor et élément de la composition de la planche au-delà même de ce qu'il dit. Au contraire Auladell utilise un texte ne lui appartenant pas mais il le fait sien, en sélectionnant ce qu'il nous transmet et ce qu'il met en image, il intègre ces textes sans fioriture froidement et humblement. La succession d'anecdotes chez Lehmann, l'alternance de gaufrier "parlé" et de grandes cases "muettes" et "contemplatives" chez Auladell. L'intime scabreux de la Favorite par rapport à la froideur des personnages inhumains du Paradis perdu. Toutes ces différences sont autant de choix qui servent le propos, l'ambiance et le rythme du récit.
Merci messieurs.

fabulous a écrit:

...la froideur des personnages inhumains du Paradis perdu

Je t'approuve presque totalement Fabulous, mais sur ce point je dirai plutôt humains, trop humains . Et c'est un des aspects qui m' a le plus intéressée dans l'approche des personnages, je ne sais si l'on ressent cela après la lecture du texte original de Milton, mais je trouve qu' Auladell a rendu ses personnages très 'abordables', c'est d'ailleurs la figure de Dieu le Père qui m' a le plus surprise ...

Il n'est pas inutile de réfléchir au vote final au moment de la sélection ; je n'ai pas voté pour Marc Antoine Mathieu l'année dernière et je me suis trompé.

Les avis divergents qui déclenchent des affrontements, sont généralement très productifs ; il ne faut surtout pas avoir peur, comme il a été écrit à plusieurs reprises, de contredire nos brillants professeurs littéraires si cultivés ! Ils parlent beaucoup (normal, c'est leur métier) mais sont très gentils, et ont sûrement à apprendre de vous, qui n'osez vous exprimer.

Je vote pour "La Favorite" pour la maîtrise du récit, son accord avec le trait, et le moment vécu à la lecture

D'accord avec Manue !
(Et avec Fab aussi) !
Satan, qui sait sa cause perdue d'avance mais qui refuse de se soumettre, qui préfère vivre libre en Enfer plutôt qu'esclave au ciel, est d'un pathétisme terriblement humain !
Dieu, monarque absolu, figure idolatrée au visage bouffi, attire presque moins la sympathie.

...et pourtant il attirera mon vote. Je ne sais pourquoi je me suis cette fois ci tant posé de question quant à ce dernier, probablement parce que les partisans de la favorite étaient fort convaincants et ont pu semer le doute, mais en toute honnêteté ma voix ira au Paradis Perdu, pour le souffle puissant qui s'en dégage. La favorite reste un excellent candidat pour le sheriff mensuel voire annuel, je ne serai donc pas déçue, quelle que soit l'issue du vote de ce mois.

Oui c’est un livre inspirant, et c’est pourquoi je l’ai choisi aussi, la poésie y est pour beaucoup, et bien qu’elle soit signée Milton, c’est un autre auteur qui a su profondément s’en imprégner, se l’appropier pour mieux nous la délivrer. Je n’aurai sans doute jamais lu Milton, mais grâce à ce merveilleux medium qu’est la bande dessinée, j’ai pu approcher son œuvre et surtout découvrir une vision de celle-ci, une vision unique, celle d Auladell. Une vision aussi de ce que peut être la bande dessinée aujourd’hui : en totale filiation avec d’autres formes d’art, pas forcément rivée à ses propres codes, que je respecte et admire pour autant. La Favorite en est un très bel exemple, c’est un livre que j’ai eu envie de comprendre, de décortiquer, mais pour lequel je suis restée plus à distance, là où Le Paradis Perdu a su me porter plus loin, au - delà même des questions de bd …
J'espère que quel que soit le 'gagnant' de ce mois-ci , aucun des deux n'éclipsera l'autre ... Alleluia

Tout comme Manue en fait, je vais donc être obligé de plagier. Mais c'est l'époque qui veut ça après tout!

Choix très difficile entre la Favorite et le Paradis perdu.

Je choisis cependant Le Paradis perdu, un livre qui m'a totalement emporté et séduit, tant graphiquement que sur l'adaptation faite de Milton, et la vision retransmise de cet épisode biblique.
Je pense me pencher davantage sur le Poème original, et en apprendre aussi un peu plus sur les anges, archanges et démons.

Une poésie sublimée par ce dessin si évocateur et envoûtant, alors même si la Favorite est une BD remarquable, le Paradis perdu a été pour moi une expérience beaucoup plus prégnante.

Je crois que je suis trop navré pour réagir.

Je crois vraiment que même si ils ont des caractères humains, ils ne le sont définitivement pas, ils sont de si pathétiques "êtres supérieurs". Ils nous rappellent à notre condition misérable mais libres de nos choix, eux ne le sont pas : l'omnipotence de Dieu l'empêche absolument et le destin de Satan ne lui appartient déjà plus.