[chronique] Des loups dans les murs par Gaiman et McKean

C’est bien connu les parents n’écoutent jamais ce que disent les enfants.
Pourtant ils entendent des choses auxquelles seules leurs oreilles sont sensibles et les adultes devraient davantage leur prêter attention...

Lorsque Lucie est bien certaine d’entendre des loups dans les murs, elle avertit sa famille. Mais rien à faire, personne ne veut la croire et d’ailleurs tout le monde sait que lorsque les loups sortent des murs, tout est fini…
Lucie seule, entend les loups, jusqu’à ce qu’un soir…



« Des loups dans les murs » est un album jeunesse qui fera frissonner petits et grands. Neil Gaiman (scénario) et Dave Mc Kean (illustrations) signent un ouvrage unique, dans l’originalité de son récit et de ses illustrations. Gaiman décline le vocabulaire du texte par synonymes et insuffle ainsi le rythme et le suspense nécessaire au thème de l’épouvante.
Le travail de Mc Kean se distingue tout particulièrement par le rythme et les effets de vitesse, les atmosphères et les lumières et un usage immodéré de la confiture de framboise !
« Des loups dans les murs » réunit tous les ingrédients nécessaires aux rêves et aux aventures.
Derrière l’épouvante c’est en fait le thème de la peur qui est abordé. Lucie devra l’affronter si elle ne veut pas que toute sa vie soit bouleversée.
A ses côtés on soupçonne, on a d’abord peur et puis petit à petit on apprend à ne plus craindre le noir, les loups, les bruits, les adultes et toutes ces histoires et…on finit par revenir rien que pour se faire peur…

cet ouvrage est un énorme coup de coeur aussi bien visuel que narratif.
Un mélange troublant d'univers graphiques différents et une naration proche du conte poétique ... Il y a tous les ingrédients pour me plaire.
Maintenant j'attends de ne plus être à découvert pour m'offrir ses autres oeuvres.

Oui, cet album est vraiment super chouette (pour moi c'est un album plus qu'une bande dessinée), en grande partie grâce aux illustrations, qui créent une atmosphère de foloup - heu, de folie.

J'aime, mais j'ai peur.

Alors je préfère partir... partir danser, chanter, tournoyer... partir me perdre toute entière dans la chevelure tentaculaire de Crazy Hair.




Dans un style complètement autre, une petite fille (encore une...) veut peigner les cheveux tout emmêlés du beau Monsieur que voilà.
Peigner mes cheveux, jeune fille ? Vous n'y pensez pas !! il y a tout un monde dans mes cheveux... c'est un nid à merveilles... un océan de couleurs... un coffre à musiques... un repère pour aventures, un fouilli de surprises, un noeud à rêves en tout genres... bas les pattes !! ou vous risqueriez de vous y perdre !

Les illustrations valent plus que tout bien sûr, jouant esthétiquement et typographiquement avec les mots, nous faisant virevolter sens dessus dessous. Un artifice de bonheurs bariolés a chaque coin de page. Voyez plutôt...

(En fait après reflexion, ça va paraître bête mais je trouve que tout le livre correspond parfaitement à cet hémisphère dans cette chevelure-là) :

Laisse-moi respirer longtemps, longtemps, l'odeur de tes cheveux, y plonger tout mon visage, comme un homme altéré dans l'eau d'une source, et les agiter avec ma main comme un mouchoir odorant, pour secouer des souvenirs dans l'air.
Si tu pouvais savoir tout ce que je vois ! tout ce que je sens ! tout ce que j'entends dans tes cheveux ! Mon âme voyage sur le parfum comme l'âme des autres hommes sur la musique.
Tes cheveux contiennent tout un rêve, plein de voilures et de mâtures ; ils contiennent de grandes mers dont les moussons me portent vers de charmants climats, où l'espace est plus bleu et plus profond, où l'atmosphère est parfumée par les fruits, par les feuilles et par la peau humaine.
Dans l'océan de ta chevelure, j'entrevois un port fourmillant de chants mélancoliques, d'hommes vigoureux de toutes nations et de navires de toutes formes découpant leurs architectures fines et compliquées sur un ciel immense où se prélasse l'éternelle chaleur.
Dans les caresses de ta chevelure, je retrouve les langueurs des longues heures passées sur un divan, dans la chambre d'un beau navire, bercées par le roulis imperceptible du port, entre les pots de fleurs et les gargoulettes rafraîchissantes.
Dans l'ardent foyer de ta chevelure, je respire l'odeur du tabac mêlé à l'opium et au sucre; dans la nuit de ta chevelure, je vois resplendir l'infini de l'azur tropical; sur les rivages duvetés de ta chevelure je m'enivre des odeurs combinées du goudron, du musc et de l'huile de coco.
Laisse-moi mordre longtemps tes tresses lourdes et noires. Quand je mordille tes cheveux élastiques et rebelles, il me semble que je mange des souvenirs.

Un hémisphère dans la chevelure, de ce bon vieux Baudelaire.

Poésie du soir, bonsoir !