Charles Trénet n'aime pas les péages. Lui, qui a toute l'éternité devant lui, est bien un peu fou de nous chanter sa Nationale 7. Baru, lui, voulait éviter les feux tricolores. Et c'est sans avoir peur des péages et autres barrières elliptiques qu'il nous entraîne sur cette autoroute du soleil, dans ce qui est l'une de ces oeuvres les plus marquantes.
Ce road-comic narre les péripéties de deux jeunes hommes qui sont pourchassés par le leader lorrain (chère à Baru) d'un groupe d'extrème-droite. Il y a Alexandre, jeune garçon de 17 ans mal dans sa peau, qui admire beaucoup le second, Karim, beau gosse de 22 ans, au look rétro. Ce dernier propose ses atouts à des femmes matures, dont notamment la femme du Jean-Marie local, le docteur Faurissier. Ce dernier le découvre, et lancera une chasse à l'homme infernale qui de déroulera tout au long de l'album.
S'inspirant - librement - du manga, L'Autoroute du Soleil est structuré en chapitre et dessiné en noir et blanc. Il a été d'abord publié au Japon, ce qui lui doit cette classification de "manga européen" par certains. L'album reste de la BD franco-belge, mais tranche avec les autres albums de Baru. La place de l'individu dans la société n'y est pas traité, ou tout du moins de tout autre manière. Et surtout, l'histoire est beaucoup plus dense et beaucoup plus longue, ce qui accorde à cette autoroute d'être plutôt un roman graphique.
Au fil des pages, les deux jeunes garçons font des rencontres qui fait évoluer leur voyage. Loin de se limiter à un cache-cache haxagonal, Baru raconte comment par exemple Alexandre se découvre et mûrit. Il exploite le potentiel de sex-appeal de Karim. Il met en évidence la folie de plus en plus forte de leur adversaire, le Docteur Faurissier. Ces trois-là rencontreront de nouveaux visages sur leur parcours, tantôt des amis, tantôt l'amour. Des alliés, des ennemis. Ou encore les deux à la fois.
Le trait de Baru est toujours aussi typique. D'obédience plutôt réaliste, il met le paquet dans les mimiques de ses personnages - surtout aux visages - en faisant foi de dessiner chacun avec une hyper-expression.