Mercredi 28 mai
Troisième étape : Piolenc – Saint-Martin-de-BrômesÔ surprise, c’est le soleil qui nous accueille au réveil et dérouler tranquillement en lézardant est un privilège qu’on s’accorde volontiers. Le Ventoux nous attend ainsi que l’étape la plus difficile du périple. Le Ventoux ... On a beau le grimper tous les ans, on ne se rappelle jamais vraiment du mal qu’on a eu à le faire à chaque fois. Ou plutôt de l’espèce d’hypnose dans laquelle l’effort te plonge au bout d’un moment. De l’engagement mental qu’une telle montée nécessite. Tu ne retiens que le positif, le décor, cette étrange sensation de se regarder faire. C’est très spécial et ça n’appartient qu’aux grands cols. On le refait par Malaucène et le choix est judicieux parce qu’on est abrité du vent. En haut, il fait onze degrés et nuageux, c’est la montagne. On descend jusqu’au Chalet Reynard. Nous déjeûnons dans l’estanco à touristes d’où nous ne ressortirons qu’après une heure trente. La bouffe est correcte mais le service est long. On s’occupe en regardant les cyclistes passer, c’est incroyable ce qu’il peut y en avoir pour un mercredi de semaine ! Certains se font même monter en fourgon jusque là pour faire simplement les six derniers kilomètres du « tas de pierres », c’est assez surréaliste ! La meilleure, c’est qu’en demandant au serveur de nous remplir les bidons, celui-là nous dit qu’il le fera bien parce qu’on est client mais que sinon, c’était cinquante centimes par bidon ! Avant, ils avaient un robinet à l’extérieur, mais avec deux mille cyclistes par jour en moyenne sur la saison, ils l’ont supprimé ...
On fait la descente sur Sault, la route est pourrie mais la pente vraiment très très douce par rapport aux deux autres côtés, il n’y a que très peu besoin de freiner.
Et l’aventure se poursuit sur le très vallonné plateau de Vaucluse et le non moins vallonné Lubéron : Banon, Saint-Michel l’Observatoire, Manosque. Il fait super bon, les conditions sont les meilleures qu’on ait depuis le début.
Dans la montée avant Gréoux-les-Bains, deux routards tout frais nous passent et ne répondent pas à nos salutations ni à nos tentatives de lancer la discussion. En d’autres termes, ils nous snobent grave. On leur colle au train et nous relançons l’allure. Ça sera la guerre jusqu’au sommet, mais ils ne parleront pas davantage et ne répondront pas à notre au revoir lorsqu’on les laissera filer dans la descente.
A quatre bornes du village où l’on a réservé pour le couvert et la nuit, Didou remarque à un croisement une flèche avec le nom du gîte. C’est dans la direction D’Esparron-sur-Verdon et ça colle puisque l’adresse est « route d’Esparron ». On s’y engage et ça n’en finit plus. Une montée incroyable se dresse près du barrage de Gréoux et pas un gîte en vue. Alors qu’on s’arrête pour prendre une photo, je remarque que mon téléphone est éteint. Je le rallume et lit un texto de Fabulous qui semble s’inquiéter. Il est déjà tard ; l’étape était longue et on a perdu un temps fou au resto. J’ai le temps de rappeller Fabulous avant que la batterie du portable ne soit définitivement à plat. Le gîte se trouve au bout d’un chemin de terre d’un kilomètre et demi et il vient nous attendre en bagnole au croisement. On constate au rendez-vous que c’est au bord du village et qu’on a pris une route touristique (et très pentue) qui rallonge l’itinéraire d’au moins sept kilomètres. Au point où on en était, on n’a pas vu trop de différence et l’anecdote a bien fait rire le gars du gîte
Les chambres sont en bois et symbolisées par un dessin d’animal. Nous, évidemment, on a eu droit à la chambre « sanglier », c’était à la fois normal et prémonitoire !
Une fois encore, la bouffe et l’accueil sont à la hauteur des difficultés rencontrées au cours de la journée. Le maître des lieux cuisine comme un chef et il a compris que nous avions fort besoin de nous abreuver. On boit la quatrième bouteille de vin avec lui et on finit la soirée à faire de la guitare et à chanter à tue-tête à la grande joie de nos voisins qui ont été bien gentils de ne pas porter plainte
Après, j’ai rangé ma guitare et Fabulous a pu commencer son concert en solo, juste rythmé par une pluie diluvienne !
Je vous recommande ce gîte si vous passez par là. L'accueil et les prestations sont au top. Pour quarante euros, hébergement, apéro, dîner aux petits oignons et pinard à foison.
Le site.182 kilomètres à 23,5 de moyenne pour 3035 mètres de déniv+
Les 21,2 kilomètres du Ventoux par Malaucène en 1H37'
Camaret (du Vaucluse)
Au sommet du Ventoux
Côté Sault
Le Contadour
Le barrage de Gréoux
Le gîte
Jeudi 29 mai
Dernière étape : Saint-Martin-de-Brômes – Roquefort-les-PinsÇa devait être la plus belle, ça ne l’aura été qu’en partie.
De très jolies petites routes nous mènent jusqu’au lac de Sainte-Croix. Le temps a l’air de tenir avec de courtes éclaircies. Le vent est soutenu et les rafales au bord du lac sont vicieuses.
Une belle grimpée nous attend. Du lac à Aiguines, tout d’abord, montée peu pentue et régulière et bien plus raide jusqu’à mille deux cents mètres et le plus haut sommet de la corniche surplombant le Grand Canyon du Verdon. La vue est sublime, c’est un ravissement
On mange un sandwich alors que des coureurs à pied déboulent dans l’endroit. On discute un peu ; ils nous racontent qu’ils font le tour du canyon par la route, soit 107 bornes en courant. L’orage de la nuit a fait s’effondrer le toit de leur tente. Il était deux heures alors ils sont partis avec un peu d’avance !
Nous, on repart à l’assaut des plateaux montagneux de Haute-Provence, Var et Alpes-Maritimes. Comps d’Artubie, Séranon, Caille. Il se met à pleuvoir et de plus en plus. On est mouillé comme des rats d’égoût et, arrivés au dernier col, après Caussols, à l’endroit où l’on commence à voir la mer, le brouillard se mèle à la partie. J’ai habité quelques années dans la région et je voulais montrer à Didou tout un tas de beaux trucs dans les 30 kilomètres de descente qui nous séparent du point final de notre équipée. En fait, c’est l’apocalypse. On descend au plus court, on reviendra samedi voir ce qu’on a pas pu.
On arrive à Roquefort-les-Pins, village entre Grasse et Nice, où Tica et Yves nous attendent. On y passera deux jours complets et le programme sera le suivant : récupération, nettoyage de vélo (obligé ...), mécanique auto (hayon bloqué sur la bagnole), agapes et orgies, poker, histoires et rigolade. Et Didou a gagné le concours de la meilleure blague :
« C’est l’ancienne et l’ancien qui sont dans le jardin. L’ancienne plume une poule et l’ancien fume une pipe, appuyé par un arbre. L’ancienne soupire et dit :
- Tu te rends comptes qu’en quarante ans, tu m’as jamais rien acheté ?
L’ancien tire une bouffée sur sa pipe et réponds :
- Pourquoi ? Qu’est-ce que t’avais à vendre ? ».
Sinon, on a réfléchi : on va sûrement investir dans un bon équipement de pluie
160 kilomètres à 23,15 de moyenne pour 2420 mètres de déniv+
Sainte-Croix-du-Verdon et le lac
Moustiers-Sainte-Marie
L'embouchure du Verdon
Aiguines
Le canyon
Du haut du Pont de l'Artubie
Le village de Caille
Trois photos du retour à Caussols du samedi, c'était dommage de rater ça !
La Cascade de Courmes, le long des gorges du Loup
Yves et Didou devant, la montagne du Cheiron derrière
Total : 675 kilomètres en 27 heures 24 minutes pour 9725 mètres de déniv+