La technique du périnée, de Ruppert et Mulot

Pas bien envie de chroniquer ça, moi... alors j'ouvre juste un sujet approprié à la discussion sur cet album qui m'a laissée plutôt perplexe. Selon les critiques lues ça et là, ce serait , je cite :

"Une variation libertine et contemporaine sur le thème de la séduction et de l'éclosion du sentiment amoureux à l'heure de l'hyperconnexion". (Dupuis)
"un jeu de séduction hyper bien fichu et dont le sexe version 2.0 est le moteur évident" (planete BD)
"un élégant et malin détournement de comédie romantique, en même temps qu’un savoureux hommage à la fiction érotique". (bodoi)

On va dire que c'est générationnel alors... Je n'ai éprouvé aucune empathie pour JH.sympa combattant de front les démons de la création et de l'abstinence, pas plus que pour Sarah, chaude peut-être, mais fuyante comme une anguille (oui, mais non ).

La seule humaine à laquelle je me sentirais connectée est Julie, bien ancrée sur terre et un peu perdue devant les créations nées de l'esprit torturé de son boss.

Le dessin ne m'emballe guère, c'était déjà le cas dans la grande odalisque, et pour ce qui est de la fiction érotique, heu ... je retiens surtout l'absence de joie des partenaires, et dans mon esprit basique, sans joie point de séduction. Si ?

Toutefois j'ai trouvé ici http://ladiesroom.fr/2014/05/21/la-technique-du-perinee/ quelques arguments qui m'ont un tantinet réconciliée avec la lecture.

Mais au final, tout ce qui reste, c'est l'insondable tristesse de cette relation !

Moi j'ai trouvé de belles qualités à ce livre.
(et cela n'a rien à voir avec le stickers orange de la couverture).
Je prendrai le temps de développer durant le week-end, c'est promis.

Effectivement, comme tout cela est bien triste, bien fade, sans élan. Que de temps perdu. Pour les héros et les héroïnes, pour le lecteur qui n'y reconnait plus rien. Il faudra que l'on m'explique, une fois encore. Ce n'est pas une lecture désagréable mais je n'ai vraiment pas compris ce qui était en jeux.
Je pense que ça n'était pas le bon moment pour moi pour cette lecture !

Comme mon ami Superphane, je trouve de belles qualités à la BD de Ruppert & Mulot.

J'aime beaucoup les métaphores graphiques pour parler de l'amour : la chute vertigineuse le long d'un monolithe, les sabres, les gouttes de spermes comme une averse trop longtemps attendue ...
le grand huit de la foire du trône pour l'orgasme est moins poétique et un peu trop convenu ...

"La technique du périnée" est bien sûr plus généralement la métaphore du désir, de la fidélité, de l'engagement, de la domination, de la soumission, de la passion et de l'addiction, de l'enfermement du couple, du phantasme ....

J'aime beaucoup le spleen qui se dégage du livre, comme une sorte de mélancolie (très actuelle) Difficile de ne pas penser à l'atmosphère des films de Sofia Coppola, à l'univers de benoit Jacquot (en particulier la désenchantée, dont le titre illustre parfaitement l'ambiance de la BD)
On retrouve ce sentiment de solitude ( car le livre de R & M parle beaucoup de la solitude ... ) dans ce merveilleux plan travelling de Benoit Jacquot (avec la très jolie Virginie Ledoyen)



Au fil de ma lecture, une chanson s'est imposée à moi, comme une évidence ...

can a écrit:

J'ai lu "La technique du périnée" et je suis un tantinet déçu. Le sujet se penche sur les nouveaux comportements, les relations, de l'hyper connectivité à la futilité des rencontres où sexualité et sentiments se délient , autant de choses qui auraient méritées à mon sens un peu plus de profondeur (passez moi l'expression). J'aurai bien fait la chronique mais je ne pense pas que j'arriverai à être suffisamment agréable pour mettre le titre en avant. M'enfin, vu la popularité croissante des auteurs et l’accueil mitigé de cet album, je ne pense pas qu'ils s’arrêteraient à ça...

Moi aussi j'aime que les choses soient à leur place   
Bon je viens de le relire et passée la déception (liée certainement à l'attente), je serai désormais moins sévère que lors de mon premier post, les arguments et la vision apportée par Tue-Loup étant aussi convaincante.
La mélancolie et le spleen sont effet très bien rendus et les trois quart de l'album sont globalement réussis, dommage que sur la fin, tout s'emballe un peu trop vite, comme si les auteurs n'étaient pas parvenus à conclure, une fois l'acte réalisé et la relation de Sarah et JH stabilisée.

Ce que je trove réussi ans le livre, c'est surtout la manière de décrire la profonde mutation de la relation amoureuse, en tout cas sa modification à l'heure d'internet.
Dans "Eloge de l'amour", Alain Badiou insiste sur le fait qu'une relation amoureuse s'établit sur une prise de risque. A l'heure de Meetic, les rencontres sont de plus en plus calibrées et l'on définit une liste de critères sensés nous épargner tout échec. On choisit donc la personne adéquate à la relation que l'on cherche à établir. Relations hygiénistes, relations tarifées ou esquisse de rencontre amoureuse, on tente vainement de rationnaliser l'acte amoureux, mieux, d'avoir un souci de rentabilité. Le livre traduit bien ce nouvel ordre des choses, où l'on peut se mettre à poil (au sens propre) devant l'autre sans n'en rien connaître. On décompléxifie la relation amoureuse, on la déconstruit plutôt, pour n'en garder qu'une dimension utilitariste. Ruppert et Mulot illustre parfaitement ce changement, proposant des images fortes (les métaphores graphiques dont parle Tue-loup) et un texte cru et sans fioriture.

Tout à fait d'accord avec Superphane et Tue-Loup.
Nous vivons une époque d'"expertise", à beaucoup de niveaux. Les relations amoureuses, le sexe, n'y échappent pas. Mais les modèles ne sont peut-être pas les bons. Ainsi, des ados s'imaginent que faire l'amour doit être un acte qui ressemble à une vidéo de youporn… Et dans le même ordre d'idée, nous sommes beaucoup à croire que la technologie nous apporte d'emblée la connaissance de toute chose.
Ici, les personnages ont sublimé le stade de l'amour physique puisqu'ils arrivent à se passer dans un premier temps d'un contact charnel. Ils jouent leur rôle comme pour un entretien d'embauche : d'abord on baise par écran interposé, et plus si affinités. Le ridicule de la situation symbolise cette distanciation moderne que l'on peut constater tous les jours avec les téléphones qui nous rapprochent des invisibles et nous éloignent des visibles. En choisissant les thèmes de l'amour et du sexe, Ruppert et Mulot livrent une critique plutôt subtile de la dérive cybernétique de nos mœurs. C'est en ça que le livre est réussi. En ce qui concerne la forme, je suis très réservé quant au texte, dialogues et vocabulaire, que je trouve plat, insipide, truffé de fautes, maniéré. On entend suffisamment les tics de langage des uns et des autres au quotidien pour ne pas avoir à se les fader à nouveau dans un livre !
Superbes couleurs d'Isabelle Merlet (comme d'habitude )

J'ai plus eu l'impression de lire un documentaire ; cette misère de sentiments existe, tant pis. Jamais je ne suis parvenu à être dans le récit.

Ruppert et Mulot nous délivre une critique assez réussie sur les mœurs sexuelles de notre société actuelle. Leur vision est bien retranscrite par les dessins assez dynamiques et de jolies couleurs. Un petit bémol pour le texte qui est plutôt synthétique.
Une lecture somme toute agréable.

Mince! moi qui croyais que c'était une BD sur l'orgasme tantrique et l'art vidéo!

Je ne crois pas que Meetic change beaucoup nos relations amoureuses ou nos relations aux autres en général, je ne crois pas en tout cas qu'ils s'agissent de changements de fond mais plutôt (et uniquement) de formes.

Bien sur je mets de coté le coup de foudre fulgurant, où du premier coup d'oeil deux êtres peuvent éperdument se plaire, mais pourtant cela n'empêcherait pas de s'apercevoir peu de temps après que sa moitié cosmique vote FN! Mais l'aurait-il (elle) signalé sur Meetic?

Les critères sélectifs sont les mêmes, qu'ils soient mentionnés en amont sur un site de rencontre ou dans une rencontre charnelle, avec ses lots de mensonges, d'exagérations, d'a priori, d'exigences (et je pense qu'il y a plus de risques avec une rencontre sur un site web qu'en vrai!), tout ceci n'est qu'illusoire.

Pour la BD, j'ai trouvé plutôt bien retranscrites les relations des différents personnages, cette tristesse générale, ce spleen et les relations aux nouvelles technologies. J'ai apprécié la narration concernant les vidéos de l'expo finale, comment graphiquement l'auteur nous les présente dans l'album, nous les fait découvrir en amont et les extrait des autres événements de l'histoire.

Mais alors pas du tout du tout d'accord.
Le numérique a profondément changé le rapport à l'autre, soit à travers les sites de rencontres, soit à travers les résaux sociaux.
Je ne crois pas qu'on ait des critères en tête quand on rencontre quelqu'un - physiques ou intellectuels - même s'il est clair que je n'aurais guère pu vivre avec une supporter ou une frontiste... Sur Meetic, on a véritablement droit à un configurateur pour cibler ses rencontres... C'était déjà le cas avec les agences matrimoniales mais l'inscription est maintenant facilitée, banalisée, fréquente et presque anonyme. On consomme l'autre (l'argument de "vente" est d'ailleurs de vite trouver chaussure à son pied) davantage qu'on ne le découvre.

Mais alors pas du tout du tout d'accord.
90% des couples se rencontrent sur leur lieu de travail (ou d'études), la plupart sont du même niveau social, des mêmes milieux, de la même confession, de la même couleur de peau... si tu rencontres quelqu'un à 25 ans, cela fait donc 25 ans de vie, d'éducation et d'expérience à t'avoir forger des critères de sélections précis et sectaires (conscients et inconscients), la liberté n'existe pas plus en amour qu'ailleurs, nous sommes une espèce conditionnée par notre organisation sociale.

Je pense par ailleurs qu'il est bien triste de définir des critères précis, d'avoir des attentes particulières sur la personne qu'on pourrait aimer, mais que cela soit inscrit sur un site de rencontre ou enfouit inconsciemment en nous ne change au final pas grand chose.

Et pour information je n'aime pas plus les réseaux sociaux que les autobiographies

Je ne crois pas que nous parlons de la même chose.
Il va de soi que nous rencontrons souvent une personne proche de nous socialement. Là n'est pas la question.
Je dis simplement que la rencontre amoureuse est souvent une question de hasard, de risque puis une affaire d'obstacles à franchir, de gestions de dissensus. Un site de rencontres propose illusoirement d'éviter tout risque et propose de rentabiliser la relation amoureuse. Ce nouveau type de relation, bien loin de Jane Austen, existe et brouille ( et inverse) quelque peu le rapport amoureux. C'est ce dont s'empare Ruppert et Mullot dans la technique du périneé.

C'est surtout histoire d'entretenir la conversation, car je pense que nous sommes assez d'accord sur le fond.
Et je trouve aussi la BD plutôt réussie de ce point de vue.

Toutefois, le risque, le hasard et les obstacles à franchir me semblent assez proches sur un site de rencontre, et ce ne sont pas les quelques critères (souvent erronés) mentionnés sur le site qui changent la donne.

De plus, beaucoup des personnes inscrites ne cherchent pas forcément à rentabiliser une relation sans risques, mais essayent simplement de rencontrer quelqu'un, après des mois... des années peut-être, à avoir vainement usé toutes les possibilités hasardeuses de rencontres habituelles.

Petit exercice de style Superphane, imagine :

Tu es célibataire, et tu cherches à faire une rencontre, tu te dis alors qu'il faudrait pour cela que tu sortes, que tu rencontres du monde, et au gré du hasard, une femme providentielle saura te séduire (ou/et inversement).
Tu choisis donc une sortie sur Clemont, (Meetic : lieux géographiques : Clermont-FD et alentour), un concert de Vincent Delerm à la Coopé, (Meetic : genres musicaux: chanson française (et par extension, tranche d'âge, milieu social)), tu éviteras toutefois de t'approcher de femmes portant un t-shirt de SF ou du PSG (Meetic : genres littéraires: conseillés par Télérama sauf SF. Loisirs: pas de supporters), et irrité par les vapeurs abondantes de fumée, tu éviteras aussi cette jolie brune fumant gauloise sur gauloise (Meetic : non fumeur, ou occasionnel), mais tu seras plus sensible à cette petite blonde ayant négligemment laissé dépasser de son sac le nouveau programme 2014 du cycle1. (Meetic : affinités professionnelles : SuperProf).

Alors oui, la rencontre à la Coopé est bien plus sympa, romantique peut-être, et paraissant plus hasardeuse, mais en y réfléchissant, tout ceci n'est que bonnet blanc et blanc bonnet!
Et surtout, tu as peut-être plus de chances de rencontrer via Meetic qu'a la Coopé (ça dépend de ton abonnement et de la fréquence de passage de Vincent Delerm).
Mais tu as raison, ces rencontres existent, et portent même un nom : comédies romantiques

Pour conclure, je partage ta vision des choses sur les rencontres amoureuses en fait, mais je pense qu'au regard des quelques 6 milliards de personnes sur terre, cette vision n'est qu'une minuscule goutte d'eau dans l'océan tumultueux de la réalité amoureuse (et là je fais surtout un amalgame hasardeux et douteux entre relations amoureuses et couples, mariages... mais hop hop, je n'ai peur de rien!!!)

(Nouvelle entrée Meetic : maîtrise parfaite de la technique du périnée : OUI/NON/en expérimentation)

Dernière petite remarque avant le 'match' de ce soir ... J’ ai trouvé intéressant le fait que les auteurs aient cherché à décrire une relation , à l’origine, purement sexuelle , sans représentation pornographique, malheureusement la crudité des dialogues vient contredire cette belle tentative. Graphiquement, leur style épuré et les couleurs ont su rendre cette lecture plutôt agréable.