Yuri est un jeune homme solitaire, torturé par un passé dont il ne lui reste que des séquelles, séquelles laissées par un traumatisme ayant entraîné une hypersensibilité auditive et des bruits omniprésents où maux de têtes et autres souffrances en sont les terribles conséquences. Un mal-être qui le hante, l'isole et le rend inapte à avoir une vie ordinaire et paisible.
De ce traumatisme, Yuri ne se souvient de rien, ou plutôt, ne veut et ne peut se souvenir. Seule lui reste une voix, cette
voix solitaire, celle d'un monstre, et un rituel salvateur, fait d'animaux morts et d'une voix amplifiée, sensé lui permettre de sortir de son corps afin de rencontrer des guides spirituels capables de le guérir.
Irène est un hermaphrodite, enfermé dans cet état d'entre-deux, ni vraiment un homme malgré ce bout de chair morte qui pend entre ses cuisses et sa voix masculine, ni vraiment une femme malgré son visage et sa chevelure. Dès lors, Irène n'aura qu'une seule obsession, pouvoir enfin se faire opérer, pour s'extraire de cette vie faite de prostitution et d'humiliations.
Mais pour cela, il lui faut de l'argent, beaucoup d'argent, trouver des petits boulots, et se prostituer encore et toujours.
Yuri et Irène ne feront que se croiser, dans un moment où tous deux pourront l'espace d'un instant se souvenir, et se confronter ainsi aux démons de leur passé, dans un lien qui les a unis à jamais.
Mais les traumatismes restent et la vie continue, peut-être meilleure, on ne le saura pas, comme une tranche de vie arrêtée brusquement. Yuri et Irène poursuivent leur chemin torturé, dans la douleur et la solitude, dans l'attente d'un monde meilleur.
On aurait peut-être aimé en savoir davantage sur les conséquences de cette rencontre, là où l'auteur nous laisse perplexe et frustré.
Le dessin en noir et blanc est précis, dans les détails des corps, des visages et laisse une impression ambiguë de mal-être, à l'image de ce que peuvent vivre Irène et Yuri.