Nombre de messages : 633 Age : 46 Localisation : brioude Date d'inscription : 31/01/2015
Sujet: Arsène Schrauwen, d'Olivier Schrauwen Ven 13 Nov 2015 - 21:46
Lecture de la couverture, mêlée de rouge et bleu, couleurs uniques du livre : « Arsène Schrauwen » « Une bande dessinée avec : Arsène – de l’aventure – de l’amour – de l’architecture – de la liberté – de la peur – de la luxure – l’inconnu – rien – un fantasme – de l’espérance – de nouvelles rencontres – des conneries artistiques – un piège »
Le livre est si foisonnant et si difficile à présenter qu’il faudrait se contenter de cette annonce, à la manière des vieux films américains.
On pourrait prendre le temps de raconter l’histoire d’Arsène, grand-père fantasmé d’Olivier, lors de son périple au Congo Belge, et le voyage que fait le lecteur entre rêves et réalités historiques, entre paranoïa et aventures.
Il faudrait écrire un passage sur ce choix bien particulier des couleurs, issu de l’expérience d’auto-production de l’auteur sur Risograph, dont la contrainte et la singularité viennent finalement nourrir un album plein de curiosités et d’inventivités.
La richesse du texte mériterait un autre paragraphe, où l’on évoquerait alors la qualité du dessin ramené parfois à son expression la plus simple, comme pour équilibrer l’abondance narrative.
Mais je vais me contenter de mettre en valeur le grand travail graphique d’Olivier S. autour du corps. Corps en mouvement.
Corps fantasmé, statufié, disproportionné.
Corps déshumanisé retrouvant peu à peu forme (magnifique page où le visage de Louis, jusque-là simple boule dotée de lunettes et moustaches, s’humanise case à case entre les mains amoureuses de Roger)
Corps humain débordant au contraire de ses limites (que ce soit par les déformations dues au vers-éléphant ou par la luxure agitant le visage des hommes-léopards de mouvements de serpents)
Corps ramené à un simple détail, répugnant comme les bouches mouvantes et grimaçantes.
Corps qui se décomposent, d’évanouissent, se multiplient.
Ce livre mérite de nombreux autres angles d’analyses et je compte sur vous, chers membres du jury, pour contribuer à ce travail !
eraserhead Comité de sélection du Sheriff d'or
Nombre de messages : 3329 Age : 50 Localisation : Dans mon Auvergne jolie parmi les bois les monts Date d'inscription : 15/01/2010
Sujet: Re: Arsène Schrauwen, d'Olivier Schrauwen Sam 14 Nov 2015 - 13:20
Un livre aux entrées innombrables effectivement. Bien vu, feufollet ! Un livre impressionnant par cette densité, d'une grande cohérence et très surprenant.
On part d'une dimension documentaire, d'un récit de famille, qui s'effacent bien vite au profit d'une histoire de plus en plus délirante. Un récit initiatique dans lequel Arsène, jeune homme de bonne famille à l'expérience plutôt limitée va découvrir ses propres angoisses, ses désirs, et se retrouver bien malgré lui embarqué dans une aventure trop grande pour lui.
Le récit d'aventure rocambolesque dérive d'un Tintin Au Congo – si Arsène a le regard naïf et bête du missionnaire blanc parti à la conquête de la contrée exotique, il n'a pas en revanche le caractère actif du personnage d'Hergé - vers les espaces sombres et inquiétants, bien souvent mentaux, d'un Au Cœur des Ténèbres.
eraserhead Comité de sélection du Sheriff d'or
Nombre de messages : 3329 Age : 50 Localisation : Dans mon Auvergne jolie parmi les bois les monts Date d'inscription : 15/01/2010
Sujet: Re: Arsène Schrauwen, d'Olivier Schrauwen Sam 14 Nov 2015 - 13:22
Un beau livre passionnant et foisonnant. J'ai mis du temps à faire le rapprochement avec "Gris", et pourtant, le sujet semble le même, construit dans son entier autour d'un personnage passif, brinquebalé contre son gré ,comme un fétu de paille d'un bout à l'autre d'un univers étrange, étranger, menaçant. Une certitude, il est très dense, long et mérite un temps de lecture conséquent. (Peut être le choix d'une édition en trois tomes aurait il servi le rythme du récit) Un mystère pour moi: la symbolique portée par le choix des couleurs bleu, rouge ou blanc.. Et une réserve: la scène d'orgie avec les hommes-léopards. Schrauwen nous avait donné un aperçu de sa fantasmagorie sexuelle dans son épopée extraterrestre. Je la trouve peu utile, peut être en trop dans les aventures d'Arsène qui ont su partout ailleurs garder le lecteur en équilibre sur un fil ténu, tendu entre délire et réalité..
feufollet Comité de sélection du Sheriff d'or
Nombre de messages : 633 Age : 46 Localisation : brioude Date d'inscription : 31/01/2015
Pour le choix des couleurs, réponse dans cette interview à Paste Magazine, l'année dernière :
O. Schrauwen : "The meaning of the color changes is not fixed; it depends on the context. For instance, the red can suggest a sweet and romantic feeling, but it can also illustrate hellish torment. The choice to work with two colors comes from the fact that I printed it first by myself, on a printer that can only print two different colors at a time. When you overlap the colors you can have quite a rich palette, but I figured it was more appropriate for the story to just juxtapose the colors. It’s a bit crude and brusque, but so is the story."
Fred Somda Stagiaire
Nombre de messages : 64 Age : 49 Localisation : Cournon Date d'inscription : 06/02/2015
Quant à l'épisode des Hommes-léopards, je le perçois comme la dernière étape dans la fièvre que vit Arsène tout le long du livre : arrivé puceau en Afrique, il connait ses premiers émois, ses premiers ébats, mais aussi ses premières rencontres avec une folie intérieure qu'il ignorait. Dans l'imaginaire colonial, la dimension de licence sexuelle des peuples indigènes est toujours un choc pour les colons, entre dégoût et envoûtement. Cet épisode me semble associer à la fois les fantasmes les moins avouables d'Arsène et une folie prête à exploser dans cette jungle loin de tout repère occidental. Après cette frénésie violente et cruelle, dont il se protège en prenant la position de l'oeuf (ce symbole revient si souvent dans le livre, ce n'est pas un hasard), le paroxysme semble avoir été atteint et peu à peu la réalité reprend sa place ; le reste du livre n'est plus qu'une redescente dans la normalité, jusqu'à ce qu'Arsène se trouve dans la position classique du colon paternaliste.
Joco Comité de sélection du Sheriff d'or
Nombre de messages : 2331 Age : 57 Localisation : Troisième à gauche Date d'inscription : 23/06/2007
Me voilà bien étonné en ouvrant le sujet, ce merveilleux livre tant annoncé par un certain nombre d'entre vous ne fait pas beaucoup débat et surtout ne donne pas lieu à beaucoup de commentaire positif. Devant tant de vide, j'en suis tout étourdi.
Pour ma part, je pense que cette fois, c'est définitif : je ne suis pas fait pour ce genre de truc. Je n'est rien trouvé d'agréable dans ce livre. Ni de vraiment désagréable, non plus, sauf l'impression immense de perdre mon temps. Alors, oui, je sais, j'aurais du prendre plus de temps, le relire deux ou trois fois... etc..... A quoi bon se faire souffrir ?
Il m'a semblé avoir rencontrer plusieurs fois le même genre de délire dans ma longue carrière de lecteurs de BD. Hélas, je suis bien incapable de citer les sources. En effet, quand un livre me fatigue, je n'ai pas pour habitude d'en retenir ni le titre, ni l'auteur.
Je vous laisse donc à vos références et repars vers d'autres lectures.
Can Comité de sélection du Sheriff d'or
Nombre de messages : 2738 Age : 46 Localisation : Golden city Date d'inscription : 16/11/2007
Non Joco, tu n'es pas seul à t'être rudement emmerdé, bon j'exagère il y a quelques fulgurances que Claudine reprends avec beaucoup de finesse dans sa chronique. Je n'en ai pas vu guère plus. L'art de la composition, du séquençage, Schrauwen l'a assurément, il lui manque l'esprit de concision.
Igor13 Jury du Sheriff d'or
Nombre de messages : 312 Age : 47 Localisation : Vic-le-Comte Date d'inscription : 22/12/2012
Sujet: et une petite séance de zoophilie.... Mar 8 Déc 2015 - 23:24
Est-ce que vous avez remarqué les cassures ou les arrondis des lignes de texte? La première est plutôt arrondi, elle suit la vague. Après, on retrouve cette anomalie de temps en temps. Envie de jouer sûrement.
Lors de la visite de la maison, le texte est à moitié caché. Face aux banalités descriptives l'auteur nous propose de nous reposer pendant la visite en éliminant le texte partiellement.
La première planche annonçant la filiation entre Arsène et Olivier avec les traits en positif puis en négatif est intriguante. Graphiquement, on nous parle. C'est le cas aussi avec les visages sans détails pour souligner l'importance des protagonistes. C'est brut, minimal mais terriblement expressif!
J'aime bien les pauses, et on en a besoin! Pas facile de suivre le délire entre réalité et fantasme parfois. Une lecture qui me laisse un peu sur le bord.
Page 29 et 30, on est dans le brutal. Arsène fantasme sur la femme de son cousin qui lui dit: "elle n'a aucune allure mais elle peut faire beaucoup de choses". Il parle de la voiture bien sûr. On retrouve se décalage tout au long de l'aventure. Ce qui fait son charme et/ou son aversion...
fabulous Comité de sélection du Sheriff d'or
Nombre de messages : 3244 Age : 41 Localisation : ... avec Mam'zelle Bulle ... Date d'inscription : 06/02/2007
Une lecture un peu longue (3 semaines pour la première lecture, ce n'est pas rien) mais en tout point fantastique.
Claudine parle des corps, je pense aussi beaucoup à la faune proposé par Schrauwen : le poisson volant, le "petit oiseau", les maintenant célèbres vers éléphants, les léopards, les hommes léopards (faune ou autochtones ?) et j'en oublie. J'ai repris le livre en écrivant ça et un peu emporté par la relecture de certains passages, je ne sais plus exactement où je voulais en venir. Bonne nuit à tous.
C'est un livre formidable !
fred Comité de sélection du Sheriff d'or
Nombre de messages : 4846 Age : 57 Localisation : entre un carton de nouveautés et une pile de retours Date d'inscription : 06/02/2007
Ce qui est formidable avec ce gars, c'est cette capacité à tenir un humour flegmatique sans jamais s'en départir, comme si l'invraisemblable était une évidence qui se transformait en rouage narratif. L'approche pince-sans-rire d'un Tintin au Congo qui assumerait toute sa belgitude (ah, la trappiste à l'ombre d'un palmier !), tout en respectant chacun des tableaux énoncés (le voyage, l'ennemi, le costume, la construction, le couronnement) est sidérant. L'imposture va même jusqu'à utiliser un papier de merde comme dans le temps et à rater (exprès) des alignements de texte ou des arrondis de cases (faits certainement avec le rond d'une petite pièce de monnaie au autre). Ce mec est complètement timbré.
Charles Olivier Comité de sélection du Sheriff d'or
Nombre de messages : 295 Age : 53 Localisation : Clermont-Ferrand Date d'inscription : 24/02/2014
Sujet: lourd, dingue Dim 13 Déc 2015 - 9:37
L'épaisseur de "Gris" me convenait amplement. J'avais écrit que c'était léger. Là non. Mais pas du tout. Je me suis parfois regarder lire ou plutôt subir ces pages qui ne me parlaient guère. La démarche est surement intéressante ; je n'arrive pas à l'intellectualiser.
Manue Comité de sélection du Sheriff d'or
Nombre de messages : 610 Age : 48 Localisation : sous le soleil exactement Date d'inscription : 09/04/2014
Lecture très laborieuse, trop fragmentée, commencée il y a plus de quinze jours ( pas pour faire plaisir à O.Schrauwen) et enfin terminée ... donc difficile de me prononcer, parfois ennuyée, parfois amusée, parfois dégoutée, sur l'ensemble intriguée , les sentiments sont multiples comme les lectures possibles de cet album ... l'idéal : le relire avant mercredi minuit , mon vote sera limite une fois de plus , sorry ...
Archi Titulaire
Nombre de messages : 164 Age : 39 Localisation : Clermont-Ferrand Date d'inscription : 07/02/2015
Olivier Schrauwen crée une œuvre foisonnante, où l’histoire pourrait vite se transformer en roman de gare (exactement comme celui que lit Arsène) mais il installe petit à petit un univers brumeux de plus en plus étrange dans ce Congo Belge déshumanisé. La lecture de ce livre place le lecteur dans une bulle où celui-ci suit les péripéties d’Arsène Schrauwen. Autour de nous tout devient chaud, moite, on est pris de bouffées délirantes tout comme le personnage. L’alcool coule à flot, le désir et le fantasme sont partout ; un jeu imprimé sur la dernière page d’un livre, un bâton dans le rectum d’un poulet, deux branches d’un arbre, une clé dans une serrure et bien sûr la scène des hommes léopards (une des plus marquantes). Une œuvre graphiquement forte aux multiples analyses qui ne laisse pas indemne.
eric Jury du Sheriff d'or
Nombre de messages : 278 Age : 49 Localisation : Clermont-Ferrand Date d'inscription : 11/11/2011
Je fais partie de ceux qui ont subi la lecture. Alors lire les louanges qui apparaissent ici me permettent de comprendre ce qu'il y avait d'appréciable, mais comme d'autre, je n'ai pas eu ce plaisir intellectuel.
Il me faudrait certainement une relecture pour un avis plus argumenté. Malheureusement, je n'en ai plus le temps.
Manue Comité de sélection du Sheriff d'or
Nombre de messages : 610 Age : 48 Localisation : sous le soleil exactement Date d'inscription : 09/04/2014
ReLecture très laborieuse prenante, sur commencée il y a plus de quinze 2 jours ( pas pour faire plaisir à O.Schrauwen) et enfin terminée ... parfois ennuyée, parfois amusée, parfois dégoutée, sur l'ensemble intriguée ...
et je rajouterai piégée tel Arsène en prise avec sa naïveté et un irrépressible désir de vivre une histoire qui le dépasse , le lecteur se laisse bringuebaler sans broncher par un artiste pas si fumeux que ça, car en totale maîtrise du peu de moyens qu'il s'est donné, les différents jeux graphiques, rapport fond/forme, sens de lecture, bichromie sont remarquables , rien que pour ça j'adhère...il y aurait encore beaucoup en dire mais il est trop tard ...
Airmic Comité de sélection du Sheriff d'or
Nombre de messages : 52 Age : 37 Localisation : Clermont-Ferrand Date d'inscription : 05/02/2015