Vue de la fenêtre masculine, ils représentent le fantasme ou la fascination, dans le cœur de l'intimité féminine, ils peuvent être à la fois source de tous les complexes mais aussi un moyen d'expression et d'émancipation. Dans un monde moderne où la culture de l'apparence et de l'image de soi sont devenus le théâtre de toutes les préoccupations, ils sont devenus essentiels, Olivier Pont a décider de nous en parler à travers sept portraits de femmes d'hier et aujourd'hui, d'ici et d'ailleurs.
Le sein nous mets donc dans tous nos états,
petit et pointu ou rond et lourd, il est le sujet le plus représenté dans l’histoire de l’art, symbole sans conteste de la femme dans l’imaginaire, il fût montré sous toutes ses formes, passez moi l'expression.
Du sein maternel représenté dans "La vierge et l'enfant" au sein engagé et politique trônant dans "La Liberté guidant le peuple", en passant par le sein érotique vu par l'école de Fontainebleau, la peinture est évidemment l'art qui l'a mis le plus en valeur.Et la BD dans tout ça ? Elle n'échappe pas non plus à la règle, le sein est vendeur et certaines catégories de lecteurs en raffolent, allant même pour certains amateurs, jusqu'à demander des femmes dénudées en guise de dédicaces. Il n'est alors plus étonnant de voir le sein remplir les cases pour apporter une touche féminine ou érotique (c'est comme vous voudrez) à l'album concerné. Ainsi la plupart des héroïnes BD nous dévoilent leurs plus beaux atouts, représentées souvent de manière sexiste, on pensera à Natacha ou Rubine, mais aussi à toutes ces supers Womans à la taille de guêpe et aux bonnets E de rigueur.
L'approche d'Olivier Pont est totalement différente puisqu
'elle est ici totalement affirmée et assumée, il a décidé de nous parler des seins qui servent de toile de fond à chacune des histoires, le titre de l'album est bien sans équivoque.
De tous lieux, de toutes époques et de toutes générations, il nous entraine donc dans l'intimité de sept femmes, on croisera tout d'abord
Chloé, adolescente pour qui la nature est déjà moins généreuse qu'elle l'est avec ses copines, alors forcément quand on va à la piscine, ça se voit. Ensuite retour en 1968 quand
Mathilde laissait une lettre à son mari pour lui faire part de son souhait d'émancipation. De choix, il en est aussi question avec
Alyson, star du cinéma érotique, dont Hollywood ne jure que par ses atouts physiques. Retour en Europe avec
Sylvia et une histoire de vengeance envers un mari infidèle puis avec
Fanny, portrait plein d'émotion, un des plus réussi de l'album. Une avant dernière nouvelle plus anecdotique nous conduira en Afrique auprès d'
Elykya, là où le sein est symbole de fertilité, pour conclure enfin par l'histoire la plus réussie de l'album, celle de Fleur tenancière de la boutique de lingerie, un petit commerce de quartier et véritables lieux de vie où les femmes retrouvent confiance et réconfort dans les produits et les conseils donnés par la patronne.
Il est presque dommage que ce livre n'ait pas commencé par là et que cette dernière histoire n'ait pas servi de pierre angulaire à l'album qui s'avère dans sa globalité de qualité, mais assez irrégulier. Si l'auteur a trouvé une unité autour de son thème, les nouvelles sont très loin d'être du même niveau, celle de Chloé pour démarrer pouvant même s'avérer dissuasive, le langage de la rue plombant la qualité des dialogues.
Nous sommes ravi de retrouver Olivier Pont qui avait dessiné et co-scénarisé avec Georges Abolin le magnifique "Où le regard ne porte pas", il y a déjà une bonne dizaine d'années. Après un très long passage consacré à scénariser pour la télé et le théâtre, Olivier Pont est de retour pour ce qui semble être avant tout un travail de commandes de l'éditeur, le niveau de certaines histoires en pâtit par moment, on regrettera aussi le jeu de mots un peu pataud du titre de l'album.
On retrouve par contre l'aisance, la délicatesse, la pudeur et la subtilité qui le caractérise pour nous parler des femmes et de leur poitrines à travers ces tranches de vies, et ce sans jamais tomber dans l'obscène ou le vulgaire.
Ce recueil restera un bel hommage à la féminité et à ce qu'elle a de plus mystérieux.