Il faut parfois écouter son instinct et ses impulsions. Ce samedi, pourtant le panier garni de belles bandes-dessinées, la raison m'aurait commandé de ne pas attraper ce livre à la couverture si sobre. La raison ne m'aurait que privé de la lecture du quatrième de couverture :
Je caresse lentement sa jambe, et sa main accompagne la mienne. Je redoute de voir surgir dans l'entrebâillement de la porte le malheureux intendant, revenu chercher le plateau de thé.Cédant à l'hilarité à la lecture de quelques sentences, je sortis ma carte bleu du manteau pour acheter et découvrir un livre dont le nom de l'auteur aurait pu me suffire à jeter à la corbeille.
Je ne vous ferais pas partager les discussions de comptoir sur les supposés amours de notre ancien président. Je voudrais surtout vous faire partager le plaisir que procure ce bouquin qui doit se lire avec au moins trois degrés de lecture.
Empreint de son auteur, le personnage principal est un président vieille France assez gauche et conservateur dans une France d'une époque qui l'était encore assez. Le thème, c'est le caractère romanesque de deux personnages qui doivent vivre un amour impossible, tant leur fonction les scelle dans le marbre. Toute l'ironie (pas vraiment volontaire) se niche dans ce pathos où les personnages apparaissent des victimes subissant l'étiquette du protocole. Au départ, le Président sera prisonnier de son propre système, duquel la Princesse fera tout pour l'extirper, jusqu'à ce qu'un évènement inverse le cours des choses, et que ce soit à son tour de subir le poids de la fonction qu'elle représente.
Mais le plus drôle reste l'omniprésent univers obséquieux et pudique où les deux êtres semblent refuser, alors que les pages défilent, toute évocation de la passion charnelle. Ainsi, les passages les plus chargés en émotion restent les jeux de regard, des frôlements involontaires, qui font vibrer les personnages, en particulier le vieux président.
On s'amusera aussi beaucoup des parallèles avec la réalité, et bien, sûr d'imaginer le fruit de la passion entre une Lady Di et un Giscard décrit comme bien séduisant (suffisamment physiquement pour faire craquer plusieurs personnages féminins). Aussi, la princesse est haït par sa belle-famille, hormis la reine, ou encore Tonton a été battu au second tour en 1981 dans une situation comparable à 02.
Livre composé avec de grosses ficelles et sans relief, que l'on a du mal à croire qu'un académicien puisse en être l'auteur. Deux possibilités s'imposent : ou bien il vaudrait mieux mettre des auteurs de BD en habit vert. Ou bien l'Ancien Président a choisi un nègre qui n'a pas sa hauteur d'esprit et son intelligence. Des qualités que l'on doit forcément lui reconnaître, mais qu'il sait rappeler au tout venant.
En résumé, je dirais que
La Princesse et le Président est un super moment de poilade, tant le bouquin incarne sa propre caricature. Ses deux personnages hors du commun sont tellement au dessus de la masse qu'ils sont les victimes d'un amour impossible, trop difficile à assumer. Ce roman mérite de dépasser sa puissante allusion à Edouard VIII qui se lit comme un Harlequin en attendant son train.