Ne vous est il jamais venu à l'idée de retourner sur certains lieux de votre enfance, de votre adolescence ?
Quand je me rends chez mes parents, il m'arrive souvent de penser à mettre le clignotant à la sortie du petit village de Bonnac pour emprunter un chemin cabossé qui m’amènera sur les vestiges d'une époque révolue, un endroit où nous avions construit avec 3 ou 4 amis d'enfance, une cabane, symbole des premières libertés, des premières cigarettes et kronenbourg.
Je ne sais pas aujourd'hui ce que j'y trouverai, peut-être une vieille planche branlante, accrochée à un clou rouillé, peut-être quelques traces de nos passages passés, sur une pierre, sur un tronc d'arbre. Je ne sais pas, de toutes façons je n'ai rien laissé là-bas si ce n'est quelques souvenirs et un bras un peu moins droit que l'autre.
Dans l'histoire qui nous intéresse ici, ce n'est pas tout à fait la même problématique car Nicolas et Olivier ont laissé quelque chose au bout du chemin, au fond de la forêt, près de la cabane, théâtre de leur exploit de jeunesse.
Dix années ont passés, dix années durant lesquelles il a manqué Ben le troisième larron de la bande, lui il a eu moins de chance dans la vie, il s'est fait serré dans un trafic qui a mal tourné, mais ça tombe bien car aujourd'hui il sort de cabane, c'est l'heure de se souvenir mais aussi de régler ses dettes avec Nico et Oliv', l'amitié aura-t-elle survécu aux sacrifices et au temps?
C'est donc sur cette idée que Benjamin Fischer aux manettes du scénario va étayer son thriller psychologique au rythme maîtrisé grâce à un suspens léger mais permanent et grâce à ce jeu de construction qui en usant des nombreux flash-back se révèle assez efficace.
Accompagné au dessin par Stibane dont le trait assez gras et les couleurs vives ne sont pas sans rappeler le travail de Didier Tronchet dans "Vertiges du Quito". Ça restera la seule comparaison avec l'ami Tronchet, car du côté de l'histoire vous l'aurez compris, il faut plutôt se tourner vers un album comme "Ma révérence".
Les amateurs du genre seront donc comblés par cette lecture qui à défaut d'être révolutionnaire parvient à divertir et intéresser jusqu'au bout, on regrettera sans doute de rester un peu en surface sur la dimension prise par certains personnages et ne pas approfondir l'amitié qui a pu les unir puis les désunir, une plus large place donnée aux retrouvailles aurait sans doute pu être opportune pour sortir un peu de l'action et rentrer dans la réflexion.
A l'heure où nous nous remettons tout juste du chaos dans lequel nous avons été plongé, il est presque bon de remettre certains sujets dans le domaine de la fiction et espérer qu'ils y restent un peu, même si ceux évoqués ici, sont devenus la banalité de nos nouvelles réalités.