Fabien c'est le gardien de musée idéal , son petit bouc soigné et son costume trois pièces Devred sont l'héritage de quinze années de carrière dans le haut lieu parisien de l'art , le prestigieux musée du Louvre. Il aime son boulot le bougre et s'attache tous les jours à guider les visiteurs du monde entier vers La Joconde ou Le radeau de la méduse , les œuvres les plus prisées des Ipad et autre Canon Reflex 600D.
Alors quand sa copine Mathilde doit le présenter à la belle famille , l'heure est grave , le moment solennel , faut dire que la famille Benion , c'est bien plus qu'un clan , ce sont les spécialistes angevin du fauteuil depuis plusieurs générations , excusez du peu. Mais les Benion , ce ne sont pas seulement des artistes de l'assise , un de leur ancêtre Gustave , cultivait aussi un certain talent pour la peinture et l'écriture , hors dans le grenier , une croute demeure , inconnue du grand public , l'étrange et envoutant , "le Chien qui louche".
Qui de mieux placer que Fabien , pour juger de la qualité du tableau , qui de mieux placer pour affirmer que cette pièce a le droit ou non d'être accrochée pour la postérité aux cimaises du Louvre , qui de plus embarrassé pour dire aux gaziers de la famille , qu'il s'agit d'une merde sans intérêt ?
Si le postulat de départ de cette histoire tend vers une chronique moderne du couple ordinaire , Étienne Davodeau nous emmène rapidement pour une ballade dans le plus grand musée de France. Outre l’intérêt pour les œuvres observées (Les Cariatides , La victoire de Samothrace , La cour Puget) , il porte avant tout un regard truculent sur les gens qui le peuple , des visiteurs , aux gardiens , en passant par les spécialistes et autres fétichistes , il dresse un tableau complet , amusant et décalé de cette petite fourmilière , de ce lieu , dont il semble s'être approprié chaque recoin.
A travers notamment Monsieur Balouchi, meilleur rôle 2014 dans un personnage secondaire , il nous invite également à réfléchir sur l'Art et sa perception, ainsi que sur les dispositifs d'acquisition des œuvres.
Comme à son habitude donc , et dans la lignée de ses albums précédents (Rural , les mauvaises gens , Lulu Femme nue , Les ignorants) , l'auteur n'a pas d'égal en terme d'humanité et de finesse d'écriture , quand il s'agit de décrire des situations cocasses ou de donner vie et coffre à ses personnages.
Si on peut reprocher quelques excès de facilité (je pense notamment aux très dispensables scènes d'amour aux dialogues très pauvres) , on ne saura que trop conseiller ce nouvel album , aux amateurs de comédie légère et absurde , ainsi qu'à tous les amoureux du musée parisien.