L'éditeur transalpin bao fait un travail remarquable. Il est devenu en quelques années l'un des tout meilleurs concernant la bande dessinée, en alternant auteurs italiens, et traductions d'albums étrangers (il sort cette année une intégrale de Pour L'Empire et le prochain Pedrosa).
Alessandro Baronciani a rejoint cet éditeur depuis son album précédent, qui publie ce mois-ci La Distanza, une belle histoire d'amour naissant sous le soleil de Sicile.
Nicola a prévu de partir pour un festival d'indie pop dans une petite ville de Sicile, avant de rejoindre son amoureuse à Londres. Mais la belle est passée à autre chose, et Nicola se retrouve sur la route du festival accompagné de deux très sympathiques vacancières, Francesca, venue de La Spezia, et son amie française Charlotte.
Tout ce petit monde apprend à se connaître, et peu à peu, entre les promenades ensoleillées et les soirées branchées, à s'aimer un peu.
Nicola part pour une histoire sur la route, au rythme langoureux imposé par la chaleur, et Baronciani en profite pour produire de très belles planches où l'on retrouve son trait épais, et ses silhouettes très pop.
L'album est d'un format plutôt réduit, et les planches s'étendent souvent en double page, mettant en jeu la lecture classique de la bande dessinée, heurtant parfois le sens de lecture et le rythme, afin de mieux faire ressentir les hésitations et les va et vient entre les personnages.
En outre, la force de l'album réside, encore une fois, dans le dessin de Baronciani, de plus en plus abouti, dans la simplicité, et dépeignant à merveille une jeunesse désabusée, pétrie de culture pop et un peu (trop) nombriliste.
Certes le temps est au doute, aux ruptures, et à l'évocation de la mort (Nicola vient de perdre un ami proche), mais le tout respire nonchalance et insouciance : les vies des personnages sont bien vides, loin de tout, et il faut bien l'énigmatique et distante Charlotte pour pimenter le récit.
L'univers de Baronciani, fait de cette mélancolie adulescente, plein de culture pop, et celui de Colapesce étaient faits pour se rencontrer : le scénariste de l'album est en effet un chanteur italien très indie pop, qui avait écrit une chanson d'après l'un des albums de Baronciani chroniqué
ici. Leur collaboration a d'ailleurs commencé par la musique (lors de concerts dessinés).
Donc, les fans de musique trouveront aussi leur compte dans l'album, qui convoque à qui mieux mieux toute une constellation de groupes indie adulés par les connaisseurs (Smog, Belle & Sebastian, les Smiths évidemment, etc...).
Un récit d'été, où l'on mange des crevettes en bord de mer et où l'on boit trop de Nero d'Avola.
On peut espérer en tout cas qu'un éditeur français se penche sur Baronciani, car aucun de ses albums n'a encore connu de traduction...
couverture alternative, pour l'édition variant