Décembre 1890.
Sur les berges de la Wounded knee, un enfant naît, un peuple meurt.
C'est durement que le récit commence, au beau milieu du massacre. Focus sur un soldat de la cavalerie, qui tue un indien de sang froid et arrache un nouveau-né à sa mère en la laissant pour morte. Ce dernier déserte avant de remettre l'enfant à sa sœur et son mari qui ne peuvent pas en avoir, il s'appellera Ulysse.
Cette première scène introduit le personnage de Jonah, ambivalent et complexe, et donne le ton du récit. Nous ne sommes pas ici dans le schéma classique « méchant contre gentil » des livres pour enfants, celui-ci s'annonce plus subtil.
Après une ellipse de 8 ans, on retrouve nos protagonistes. Ulysse a grandi sans savoir d'où il vient, ses parents adoptifs lui cachant ses origines. Il vit dans une société de blancs où il subit les railleries de ses camarades, à une époque où malgré les traités et la paix apparente, la haine et le mépris du peuple Indien sont encore bien présents.
Cette schizophrénie sociale se retrouve dans le personnage d'Ulysse, finalement rejeté par ceux à qui il pense appartenir. Nous le suivons alors dans quête d'identité : il va devoir renaître puis se confronter à ses propres contradictions et aux regards des autres. Une (re)-construction qui s’avérera compliquée et parfois violente pour lui et son entourage.
Un des autres thèmes abordés dans l'ouvrage est le traumatisme des soldats, qui doivent se confronter à leurs actes une fois la guerre finie, ou fuie dans le cas de Jonah. Il en fait les frais tout au long de la seconde partie de l'ouvrage. Alcoolique, violent, raciste, meurtrier, il est hanté par ses démons mais, pétri de contradictions, il ne tombe pas dans le cliché.
Le Western et ses Indiens face aux Cowboys est un thème récurrent dans la littérature jeunesse. Pourtant Marion Festraëts crée la surprise en nous proposant un récit tout en nuance où personne n'est tout noir ou tout blanc. Benjamin Bachelier au dessin réussit à illustrer ce texte avec justesse. Ses planches, en couleurs directes, relèvent pour certaines plus de la peinture que du dessin.
Marion Festraêts est une touche à tout, rédactrice en chef adjointe pour le service arts et spectacle de l'Express, elle est aussi co-scénariste de la série Chefs de France 2. Benjamin Bachelier quand à lui est illustrateur de presse et de littérature jeunesse. Le duo avaient déjà travaillé ensemble sur « Dimitry Bogrov » pour la même collection Bayou.