Suzy Wong et les esprits de Virginie Broquet

Suzy Wong et les esprits est un livre de bande dessinée qui a pu être édité en partie grâce à un financement participatif réussi sur la plate-forme Ulule. Son éditeur, Gope, a été fondé en 2009 sous un statut associatif dans le but de proposer au marché francophone des ouvrages originaux et modernes ayant pour cadre des pays du Sud-Est asiatique comme la Thaïlande, la Malaisie ou la Cambodge. Le second objectif était de favoriser une offre éditoriale en langue française dans des pays où l’anglais est roi. C’est ainsi qu’un des premiers projets de Gope s’est articulé autour de la traduction d’un roman des années cinquante, Le Monde de Suzie Wong, de Richard Mason. Deux autres romans inspirés du personnage mythique figurent au catalogue de l’éditeur, et désormais une bande dessinée.

Suzie Wong, ou Suzy Wong, est l’égérie asiatique des marins du monde entier, un nom prononcé dans tous les bateaux. Personnage fantasmé, archétype de la prostituée au grand cœur (source), elle alimente les rêveries des artistes éblouis par les néons des bars de nuit et le désir des Occidentaux atteints par la fièvre du tourisme sexuel. En confiant Suzie à Virginie Broquet, l’idée des éditions Gope était de continuer à développer les différentes facettes du personnage équivoque à travers une collection d’ouvrages, ou plutôt différentes visions. Et c’est une composition très personnelle, habitée, que livre Virginie Broquet, une réappropriation aux résonances multiples.

Le propre d’un artiste réside dans sa faculté à intégrer son univers à n’importe quel sujet, qu’il s’agisse d’une contrainte ou même d’une commande (cf. Le Mépris de Godard). Quoi qu’il traite, ce qui résulte de son travail n’est autre que l’émanation de son style. Quand Virginie Broquet part à la rencontre de Suzy, elle s’invite elle-même à la confrontation. Il n’est plus question de femme fatale ni de prostitution, mais de ses propres voyages, réels ou intérieurs. D’une certaine manière, elle redessine les contours de la jeune femme et projette dans ses gestes et tourments des interrogations qui lui appartiennent en tant qu’auteur ; elle profite du sujet Suzy Wong pour se replonger dans ses carnets et ses expériences orientales. Au bout du compte, elle assemble ; elle résume.

Suzy Wong et les esprits est construit à la manière d’un carnet intime. Des impressions viennent souligner chaque case ou tableau (un ou deux par page), comme autant de mises au point naïves qui révéleraient le foisonnement graphique et l’effervescence des couleurs. Il y est question d’une déambulation presque touristique. Suzy, avec l’aide de la triade d'esprits qui la guide et la protège, s’est mis en tête de réunir une famille éclatée après le drame de l’incendie de la maison close de sa mère qui coûta la vie à cette dernière, la fameuse Suzie Wong. De New York à Tokyo, de Hong Kong à Shanghai, elle part à la rencontre d’oncles et tantes afin de les convaincre de se rabibocher.

Ce n’est pas une histoire qu’il faut s’attendre à se voir conter, mais plutôt une succession d’impressions, magnifiées par les peintures de l’auteur. La simplicité du texte, son côté délibérément puéril et gentillet (les questions laissées sans réponse, adressées à la deuxième personne à la manière d’une adolescente qui voudrait comprendre la vie) est un prétexte au voyage et à la visite de mégalopoles dont le tableau n’est pas sans rappeler, dans son atmosphère asphyxiante, les images du New York-sur-Loire de de Crécy. Il y a aussi du Fred Bernard dans la sensualité de Suzy et la langueur des corps. Suzy Wong et les esprits est un livre rare, d’une grande intensité, qui met en valeur la sensibilité et le talent immense d’une artiste méconnue qui mérite de ne plus le rester, Virginie Broquet.

Bravo ! Après ça, comment ne pas craquer ?

Un livre qui se regarde plus qu'il ne se lit, à chaque page, une explosion de couleur s'offre au lecteur.
Une belle réflexion sur la capacité à pardonner et réunir à travers ces périples aux quatre coins de l’Asie, l'intensité est très présente même si cela va parfois un peu trop vite à mon goût, quelques pauses auraient fait du bien.
Moi non plus, je n'ai pas trop saisi la valeur ajoutée des trois esprits et la coquille en page 104 est regrettable.

Ouais... Beaucoup de démonstratifs, qui me font penser que l'enchaînement séquentiel fonctionne plutôt moyennement.
Le texte est vraiment le point faible du livre, c'est pataud, répétitif, mal fagotté.
Le format n'aide pas à apprécier les couleurs non plus, et puis je ne suis pas vraiment fan du dessin, que je trouve certes truculent, mais sans accroche, sans précision narrative.

Conquise par le dessin je fus, mais que ça va vite, trop vite...

L'univers graphique m'a transporté, mais pourquoi tant de précipitation. On est à peine arrivé à un endroit qu'on le quitte. Sur certains ouvrages j'ai envie de dire "abrège", mais ici ce serait plutôt "pose-toi". Dommage.

Encore une explosion de couleurs ! Rouge Karma et Suzy Wong lus par temps gris, excellent pour le moral ! Dans le foisonnement du dessin j'ai parfois eu du mal : mes planches préférées sont celles des villes et bâtiments, je ne suis pas fan du dessin des personnages. Et le côté répétitif de l'histoire m'a aussi quelque peu chiffonnée, j'avais vraiment l'impression de lire un conte pour enfants un tantinet poussif. Vraiment pas convaincue, donc, malgré le bel emballage coloré.

Quand Suzy Wong débarque, c'est un éclatement graphique tout en couleur et en extravagance. Il suffit, alors, de se laisser porter par son histoire qui n'a au fond pas une grande importance. Elle n'est qu'un prétexte au voyage, à la visite, à la rencontre de ces grandes métropoles et de ces personnages tous plus étranges les uns que les autres.
Cette lecture m'a ravi et depuis je feuillette ce magnifique livre régulièrement, juste pour le plaisir des yeux.

La seule vraie faiblesse de ce bouquin étant le texte, au niveau de l'écriture, mais surtout à cause de cette horrible typographie qui gâche un peu le reste.

Ce fut pénible de la première à la dernière page (je dis "dernière" mais je ne suis pas allé jusque là ne voulant pas piquer une seconde crise après celle d'avril).
La mise en page est douteuse et les doubles pages issues de carnet de voyage sauvent à peine l'ensemble du naufrage...
Etait-ce le poisson de mai ???

Le dessin est très inégal, Virginie Broquet peut nous proposer des doubles pages magnifiques (trop rares à mon goût) mais aussi des pages où le dessin est beaucoup moins abouti.
On oscille entre une histoire sous forme de BD et le carnet de voyage. Le problème est que l'on passe très vite d'une ville à l'autre, sans en voir plus sur ces charmantes destinations. Et il en est de même pour les personnages, qui sont à peine développés.
De plus, j'ai été mi-amusé, mi-agacé par "Cherche et trouve" Hello kitty qui sont sur de nombreuses pages !

Très partagée après cette lecture : les double-pages sont magnifiques et j'aime beaucoup le dessin de Suzy Wong mais la plupart du j'ai trouvé les dessins beaucoup trop chargés et confus.
C'est plus un carnet de voyage pour moi qu'une bd avec une vraie histoire car c'est vrai que tout va beaucoup trop vite.

J'ai trouvé une très grande force au dessin de Virginie Broquet, une pulsion rendue qui illustre et soutient parfaitement les choix de narration de l'auteure.
J'ai appréhendé l'histoire et les histoires qu'elle raconte comme la reconstitution d'un roman familial, où finalement de très nombreuses choses auraient pu être dite, mais où l'on se concentre sur le récit des sensations. Ces sensations qui nous rattache à notre enfance, autant d'images brouillées et de souvenirs plus ou moins déformés qu'à l'occasion nous pouvons balayer dans notre tête en une fraction de seconde, en un battement de paupière ou dans le cas de ce livre en une image tremblante et vibrante à l'a fois.
J'ai finalement eu un rapport très évident à ce livre, même s'il n'est pas parfait et je suivrais avec beaucoup d'intérêt la suite des travaux de l'auteure!